Non aux rafles, non aux expulsions!
Solidarité avec les travailleurs étrangers !

(«le prolétaire»; N° 478; Septembre-Octobre 2004)

 

Après les incendies de cet été qui ont fait des dizaines de morts parmi les prolétaires (en général africains) contraints de risquer leur vie en habitant dans ces logements insalubres parce qu’ils n’ont pas les moyens de se payer des logements décents ou parce qu’on ne veut nulle part d’eux, les politiciens au service de ce capitalisme criminel ont décidé de s’attaquer... aux sans logis vivant dans des taudis, squattant des locaux abandonnés. Pour notre ministre de l’intérieur en effet «il y a tout un tas de gens qui n’ont pas de papiers pour certains et qui s’entassent à Paris». Les coupables sont trouvés: si les prolétaires brûlent vifs, c’est bien leur faute: qu’avaient-ils besoin de s’entasser dans des locaux pourris au lieu d’habiter sainement à Neuilly?

Et depuis ce moment la police a multiplié les expulsions musclées et à grand spectacle, jetant littéralement des dizaines de familles à la rue et en profitant pour arrêter les immigrés sans-papiers. On estime à plus de 300 personnes les expulsés en un mois et demi.

L’erreur serait de voir là la seule initiative d’un Sarkozy préparant sa future campagne électorale par la multiplication des actions antiprolétariennes à poigne et par une surenchère anti-immigrés et xénophobe. Son rival politique, le premier ministre de Villepin, avait lui aussi tenu à afficher sa détermination répressive lors de son passage au ministère de l’Intérieur et il est aujourd’hui entièrement solidaire des initiatives de son ministre.

Mais les partis de gauche qui versent des larmes de crocodile sur les victimes carbonisées des incendies de cet été n’ont en réalité rien fait à la Mairie de Paris en faveur des prolétaires sans-logis, alors que les services municipaux estiment à plus de mille les habitations dangereuses dans Paris, alors qu’il y a plus de 100.000 demandes de logements en souffrance et que, parallèlement, des dizaines de milliers de m2 d’immeubles de bureaux restent vides et que la spéculation immobilière atteint des records!

Mais pour faire véritablement quelque chose il faudrait s’attaquer aux puissants intérêts capitalistes qui sont derrière cette spéculation immobilière, autre face de la crise du logement pour les prolétaires et les couches les plus démunies de la population; il faudrait s’attaquer aux lois mêmes du capitalisme et renverser de système. Et cela on ne peut le faire dans les salons de l’Hôtel de Ville, ni le demander aux partis et organisations de gauche qui ne songent qu’à gérer et protéger ce système au lieu de le combattre. Engels écrivait il y a plus d’un siècle:

«L’extension des grandes villes modernes confère au terrain, dans certains quartiers, surtout dans ceux situés au centre, une valeur artificielle, croissant parfois dans d’énormes proportions; les constructions qui y sont édifiées, au lieu de rehausser cette valeur, l’abaissent plutôt, parce qu’elles ne répondent plus aux conditions nouvelles; on les démolit donc et on les remplace par d’autres. Ceci a lieu surtout pour les logements ouvriers qui sont situés au centre et dont le loyer, même dans les maisons surpeuplées, ne peut jamais, ou du moins qu’avec une extrême lenteur, dépasser un certain maximum. On les démolit donc et à leur place on construit des boutiques, des grands magasins, des bâtiments publics (...). Il en résulte que les travailleurs sont refoulés du centre des villes vers la périphérie, que les logements ouvriers, et d’une façon générale les petits appartements deviennent rares et chers et que souvent même ils sont introuvables; car dans ces conditions, l’industrie du bâtiment, pour qui les appartements à loyer élevé offrent à la spéculation un champ beaucoup plus vaste, ne construira jamais qu’exceptionnellement des logements ouvriers».

Et donc: «Aussi longtemps que subsistera le mode de production capitaliste, ce sera folie de vouloir résoudre isolément la question du logement ou tout autre question sociale concernant le sort de l’ouvrier. La solution réside dans l’abolition de ce mode de production, dans l’appropriation par la classe ouvrière elle-même de tous les moyens de production et d’existence» (1).

Le réformisme (ce qu’Engels et Marx appelaient à leur époque le socialisme petit-bourgeois, qui entendait «remédier aux anomalies sociales afin de consolider la société bourgeoise» - Le Manifeste) se refuse bien sûr à admettre cette conclusion. Non seulement il se refuse à l’admettre, mais il démontre tous les jours qu’il se trouve de l’autre côté de la barrière, du côté des adversaires du prolétariat.

Un exemple récent nous est donné à propos des expulsions. Le 11 octobre la police a expulsé par la force 8 familles africaines squattant des immeubles insalubres à Montreuil depuis 5 ans (après avoir payé un loyer pendant 2 ans au propriétaire). Bien qu’elles soient inscrites depuis des années sur les listes de demandes de logements HLM, que leurs enfants aient été reconnus souffrir de saturnisme (intoxication au plomb), aucun service social ne leur avait rien proposé.

Se retrouvant à la rue après leur expulsion, les familles occupaient alors une salle municipale voisine.

Que fit la mairie PCF de la ville? Elle appela le soir même la police pour faire expulser à grand coups de matraques (provoquant plusieurs blessés au cours des échauffourées) une deuxième fois les familles prolétariennes qui venaient d’être expulsées et qu’elle redoutait d’avoir à prendre en charge. Dans un communiqué le maire, Brard, revendiquait ensuite cette expulsion en accusant les familles d’avoir été manipulées et en condamnent l’action de «petits groupes activistes violents». La violence des CRS appelé par lui, il va sans dire qu’il la soutient...

Cette attitude du PCF n’est en rien exceptionnelle et elle rappelle d’autres cas où ces sociaux-chauvins ont eu recours à des moyens violents contre des familles de prolétaires immigrés. Dans un communiqué il vient d’ailleurs ouvertement de protester contre le fait d’avoir à apporter dans certaines villes une aide sociale à des expulsés!

Et si nous ne parlons pas du PS, c’est tout simplement parce que sa responsabilité est trop connue dans l’établissement de mesures pour renforcer les attaques contre cette catégorie de prolétaires: le premier charter de sans-papiers expulsés n’avait-il pas été l’oeuvre de la socialiste Cresson? N’est-ce pas le premier gouvernement socialiste qui avait régularisé les prisons (autrefois) clandestines de travailleurs sans-papiers, comme le tristement célébre centre d’Arenc? N’est-ce pas Michel Rocard qui avait justifié les expulsions avec son fameux: «nous ne pouvons accueillir toute la misère du monde»? Sans parler des lois Chevénement, etc., etc.

Solidarité avec les prolétaires sans-papiers!
 

L’hostilité des partis de gauche envers les travailleurs immigrés, témoignage de leur nature antiprolétarienne, n’est que le reflet de la politique bourgeoise de division de la classe ouvrière entre ses différentes composantes pour mieux la paralyser et l’affaiblir. Les capitalistes ont besoin de la main d’oeuvre composée par les travailleurs étrangers et d’autre part ils ont tout intérêt à dresser les prolétaires de souche contre ceux-ci en les présentant comme une menace contre leurs emplois et leurs salaires: voir l’exemple récent du fameux plombier polonais lors du référendum sur la constitution européenne. Mais en outre il leur faut en permanence réguler du mieux possible ce volant de main d’oeuvre en fonction de leurs besoins. D’où ces tentatives continuelles et en apparence contradictoires, entre les expulsions et refoulements aux frontières (dont récemment les morts de Ceuta et Melilla et l’abandon en plein désert de candidats à l’émigration ont donné un nouveau et tragique exemple, après les affaires du même type au large des côtes italiennes) et les propositions à la Sarkozy d’établir des «quotas» d’immigrés et les projets similaires du PS.

Les prolétaires ne doivent en aucune façon rentrer dans ce jeu: les travailleurs immigrés et les candidats à l’émigration sont leurs frères de classe à qui ils doivent réserver toute leur solidarité. Ce ne sont pas les travailleurs étrangers qui les exploitent, les licencient, les plongent dans la précarité et les répriment, mais les capitalistes et leur Etat. Contre le capitalisme, l’unité des prolétaires quelle que soit leur race et leur nationalité, quel que soit leur statut administratif, est un besoin vital. Ce sont les nécessités mêmes de la lutte qui imposent au prolétariat d’unir ses rangs, de surmonter toutes les divisions que créent et attisent les bourgeois et leurs agents.

Le soutien aux travailleurs immigrés, aux sans-papiers en butte à la répression, au racisme et aux tracasseries de toutes sorte doit être inconditionnel si les prolétaires veulent présenter un front uni à leurs adversaires de classe: il en va des succès futurs de la lutte ouvrière.

 

Non aux rafles, aux expulsions, aux arrestations, aux harcèlements policiers! Régularisation de tous les sans-papiers!

Egalité complète des droits pour les travailleurs immigrés! Liberté de circulation pour les travailleurs étrangers!

Non au contrôle de l’immigration!
 



(1) «La question du logement», Friedrich Engels, 1872-1873

 

Particommuniste international

www.pcint.org

 

Retour sommaires

Top