MAN Energy Solutions Saint-Nazaire

Ni défense de l’entreprise, ni défense de l’intérêt national : combattre les licenciements sur le terrain de classe 

(«le prolétaire»; N° 540; Février-Mai 2021)

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L’entreprise MAN a annoncé à la fin de l’année 2020 un « plan social » se traduisant par la destruction de 67 emplois sur son site de Saint-Nazaire (sur un total de 630). A ces suppressions, s’ajoute la mise au chômage partiel de 160 ouvriers.

L’entreprise MAN est une filiale du groupe allemand Volkswagen qui cherche à rationaliser au maximum la production pour vendre l’entreprise qui subit les contrecoups de la baisse des commande liée à la pandémie et de la remise en cause du diesel (jusqu’à récemment l’entreprise s’appelait MAN Diesel). C’est pourquoi Volkswagen envisage la suppression d’un quart des emplois à l’échelle de toute l’entreprise (quatre milles sur quinze milles). Ce premier chiffre annoncé a été réduit à deux milles six cents après un « dialogue social » avec le syndicat collaborationniste allemand IG Metal.

Nous sommes face à une classique restructuration d’une entreprise capitaliste avec son cortège de licenciements, de « reconversion », de transferts forcés vers d’autres sites… Rien d’exceptionnel dans cela. Et la réponse du collaborationnisme, CGT dans ce cas, est également très prévisible.

 La CGT du site a laissé s’exprimer la colère avec un débrayage le 19 novembre pour créer un pseudo « rapport de force » avant une réunion avec la direction.

Cette petite excursion sur le terrain des luttes n’a pas duré longtemps, ce fut même une parenthèse dans un flot de collaborationnisme. Les prolétaires ont eu le droit à toutes les grosses ficelles des tactiques réformistes qui conduisent à coup sûr à la défaite...

 Tactique n°1 – Expliquer aux patrons qu’ils pourraient mieux faire

Le premier angle d’ « attaque » de la CGT est d’expliquer que le site est bénéficiaire : la CGT s’adresse « au siège pour rappeler que notre site fait des bénéfices et que ce plan est injustifié » (« Man : les salariés de Saint-Nazaire, oubliés de l’Allemagne », Ouest France, 5 septembre 2020). Elle regrette également que « cette restructuration […] se résume à un plan d’économies sur le dos des salariés pour satisfaire l’appétit des actionnaires, sans prévoir en contrepartie des investissements pour pérenniser l’avenir du groupe » (Communiqué du 23 juillet 2020). Si les profits étaient en berne ou si le patron justifiant ses attaques pour garantir la « bonne santé » de l’entreprise, ces syndicalistes accepteraient-ils les « sacrifices » ?

Logiquement, le collaborationnisme se fait conseiller en stratégie industrielle : « au cas où le carnet de commandes se remplirait à nouveau, les 76 postes appelés à être supprimés seront un handicap pour développer l’activité vers des solutions nouvelles autour des centrales hybrides et les moteurs à injection hydrogène, indique le syndicat CGT de l’usine » («  grève à Saint Nazaire chez Man contre un plan de suppression d’emplois », lanticapitaliste.org, 24 novembre 2020).

 Tactique n°2 – Trouver des coupables (de préférence étrangers) pour diviser la riposte

Le plan de licenciements s’attaque massivement aux sites allemands mais la CGT pleurniche : « On est pénalisé alors qu’on fait partie des bons élèves » et montre du doigt les sites d’Augsbourg et Hambourg, déficitaires. (« Man : les salariés de Saint-Nazaire, oubliés de l’Allemagne »)

Comme l’argument ne porte pas, la CGT dégaine la défense de la force de frappe nucléaire ! Elle met en avant que les moteurs produits ont « des applications stratégiques pour l’État notamment en marine nationale et en groupe de secours dans les centrales nucléaires » (communiqué du 23 juillet). Et elle en ressert une louche dans son tract de mars en expliquant que le plan « social » est contraire aux intérêts « des applications stratégiques françaises que sont la sûreté nucléaire et la marine nationale » (Tract du 31 mars qui reproduit très largement un article du journal bourgeois Les Echos).

 Tactique n°3 – Quémander une intervention de l’État bourgeois

Bien entendu, collaborationnisme aime entretenir les illusions dans un Etat bourgeois au-dessus des classes et garant de « l’intérêt général » qui unirait bourgeois et prolétaires.

C’est pourquoi, dès l’annonce des licenciements, les syndicalistes collaborationnistes se lamentent et espèrent « vivement que les pouvoirs publics ne resteront pas indifférents à cette situation et qu’ils interviendront pour permettre à une entreprise profitable de bénéficier d’un projet de développement et non de récession tel qu’il se dessine aujourd’hui ». (Communiqué du 23 juillet 2020). En mars, elle s’interroge donc pour savoir si « l’Etat français à l’image de ce qui est fait en Norvège, ne pourrait-il pas être plus interventionniste qu’il ne l’est aujourd’hui ? » (tract du 31 mars). A quoi sert-il d’appeler à l’aide un Etat qui passe son temps à s’attaquer à ses salariés en supprimant des emplois, en dégradant les conditions de travail, en renforçant le despotisme des hiérarchies… ? Seulement à entretenir les illusions et à désarmer les prolétaires face à l’ennemi de classe !

 Tactique n°4 – Dialoguer avec le patron encore et toujours

Fidèle à la stratégie du « dialogue social » qui sert de barrage à une véritable riposte de classe – en particulier en utilisant l’arme de la grève –, la CGT pleurniche : « le Groupe n’envisage pas de modifier son projet de restructuration qui de leurs mots est le meilleur ! Bien entendu la CGT MAN-ES n’est pas de cet avis ! Pour autant, le dialogue se poursuivra avec le Groupe et si possible sur le site de Saint-Nazaire. Ce nouvel échange sera le moment pour aborder de nombreux sujets restés sans réponses et d’autres importants comme les orientations futures de l’entreprise et sa place sur le développement des nouvelles solutions (dont hydrogène, éoliens, etc…) ».(« Saint-Nazaire : la CGT condamne vigoureusement le plan de restructuration chez MAN » www.saintnazaire-infos.fr 26 septembre).

 L’action du collaborationnisme à MAN n’a rien d’exceptionnel et est caractéristique du rôle joué par la CGT et Cie – y compris le syndicalisme « alternatif » à la sauce SUD – dans la répartition des rôles pour maintenir le calme social. Il canalise les travailleurs dans une série de faire-semblant, et est l’agent direct du capital pour faire se retrousser les manches au prolétariat afin de garantir la bonne marche de l’économie nationale et la défense de l’indépendance nationale.

Les prolétaires de MAN font, après bien d’autres, les frais de la politique chauvine et anti-ouvrière du syndicalisme de collaboration de classe. Contre ce chauvinisme qui divise et désarme donc les travailleurs, la classe ouvrière doit opposer ses propres principes d’indépendance prolétarienne qui ne prend en considération aucun intérêt national et capitaliste

Les prolétaires de MAN font également les frais des appels à l’État bourgeois, des appels à la solidarité en direction d’un ennemi redoutable. Pour se défendre, les travailleurs ne peuvent pas compter sur l’Etat bourgeois ni sur une politique de compromis avec celui-ci dans le cadre de perpétuelles négociations.

Seule la crainte de la lutte ouvrière ouverte peut foire reculer la bourgeoisie. Pour préparer ces luttes, il est urgent de rompre avec les orientations des directions syndicales ; ce qui implique l’organisation autonome des travailleurs sur des bases de classe, dans ou hors des syndicats, mais toujours indépendamment de la hiérarchie syndicale et de la pratique du collaborationnisme réformiste.

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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