Manifeste de la Fraction Italienne de la Gauche Communiste

( Manifeste la Fraction après son Congrès de 1935. Extraits ) (1)

(«programme communiste»; N° 104; Mars 2017)

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Prolétaires!

 

La fraction italienne de la gauche communiste s’adresse à vous avec la pleine conscience de la gravité énorme de la situation actuelle et des responsabilités qui pèsent sur elle : conscience et responsabilité qui ne sont pas des affirmations vides et abstraites, présomption ou prétention, mais les produits d’un long passé d’activité politique.

Par la solide cohérence et le développement de ses positions politiques, que les événements ont confirmées, notre fraction peut représenter aujourd’hui, dans l’ouragan social où tout périclite et se précipite, l’ancre à laquelle peut s’attacher le prolétariat, l’extrême tranchée de la révolution où se construisent et se trempent les bataillons de la victoire communiste. L’appel de notre fraction tend à mobiliser vos énergies afin qu’au naufrage de vos institutions de classe et de vos vies dans la guerre, soit opposée la seule réplique que l’histoire et la lutte des classes admettent: le naufrage et la destruction du régime capitaliste au travers de votre victoire insurrectionnelle. Dans ce but, seule la compréhension du passé peut projeter la lumière sur l’avenir et nous faire apercevoir le chemin de la victoire.

Fascistes, démocrates, socialistes et centristes sont arrivés au terme de leur œuvre: après avoir, par des voies différentes, intimement collaboré à l’œuvre de démantèlement et d’étranglement du prolétariat mondial, ils se rejoignent et fraternisent pour donner à cette œuvre la seule conclusion que permet un régime basé sur la division en classes: la guerre. Oh! tous, de Staline à Vandervelde, de Mussolini et Hitler à Laval et Baldwin, tous voudraient éviter de tomber dans le précipice, après l’avoir, pendant des années et des années, creusé avec les os des prolétaires massacrés. Ainsi qu’en 1914, de même aujourd’hui, ceux qui - au travers de la guerre civile que le régime capitaliste porte en ses entrailles - ont étranglé, en le prolétariat, la seule force historique capable de construire une société sans classe qui opposera à la société bourgeoise de l’exploitation de l’homme par l’homme et de la guerre, l’harmonieuse convivance de l’humanité, non plus assujettie, mais s’assujettissant le processus de la production et de son développement; ceux qui, aujourd’hui, comme en 1914, ont vaincu dans la guerre civile, au nom et pour le compte du capitalisme, consacrent cette victoire dans le déchaînement de la guerre : après la « paix » entre les brigands pour massacrer le prolétariat, la «guerre» entre les brigands pour l’hécatombe de millions d’ouvriers.

Au nom de la «paix», on prépare fiévreusement la guerre. Mussolini voudrait «pacifiquement  conquérir l’Éthiopie et, suivant le chemin que les démocrates d’aujourd’hui, français et anglais, ont battu dans le passé, il veut amasser des monceaux de cadavres en Abyssinie afin de «civilise» ces territoires, lui qui personnifie le régime d’esclavage et de terreur qui a brisé provisoirement la seule force de la civilisation en Italie : le prolétariat; lui, le bourreau qui, clouant une croix de mort à chaque foyer ouvrier, ne pouvait toutefois empêcher que les morts, les emprisonnés, les déportés deviennent les piliers du parti de la victoire révolutionnaire, de ce parti qui manqua en 1919-20 pour donner à l’éruption révolutionnaire des masses, conscience et substance, pour en faire le torrent qui portera l’humanité de la phase préhistorique des régimes de classes à la phase supérieure où l’histoire peut commencer: la société communiste.

«Pacifiquement», le Négus voudrait conserver sa domination sur les populations abyssines soumises à un régime d’exploitation infâme; ses déclamations sur l’indépendance et l’intégrité de la «nation», dans la phase actuelle où la seule force de progrès est le prolétariat mondial, ses déclamations se révèlent pour ce qu’elles sont: des instruments de tromperie des masses et Hailé Sélassié acceptera tous les concours en cette œuvre d’exploitation des travailleurs abyssins: celui de financiers «étrangers» qui acquerront des concessions pour sucer le sang des populations indigènes, celui des gendarmes «étrangers» qui briseront l’échine de ces travailleurs qui oseraient se dresser en un effort de défense et de rébellion.

«Pacifiquement», les impérialismes français et anglais voudraient conserver les positions conquises à Versailles.

«Pacifiquement», l’impérialisme allemand voudrait obtenir une révision des frontières établies en 1919.

«Pacifiquement», les socialistes voudraient garder les places qu’ils ont pu conquérir dans les organismes que le prolétariat a fondés au prix de la vie des ouvriers et en des batailles où il dut affronter la férocité capitaliste, dans des organismes qu’ils ont pliés au service de l’ennemi; «pacifiquement», ils voudraient continuer l’orgie dans l’attente tranquille des appointements mensuels et des honneurs dans les ministères, les parlements et les autres institutions capitalistes.

«Pacifiquement», les centristes voudraient continuer à maintenir le prolétariat russe en une sujétion économique et politique qui leur permette de pénétrer dans l’aisance, la tranquillité, la débauche où se remuent les exploiteurs capitalistes.

Mais les bases de la société capitaliste ne permettent pas de rester indéfiniment sur les rails d’un cours d’événements, sur la ligne d’une uniformité constante qui, domptant et étranglant le prolétariat (la personnification sociale de la seule force capable de se mettre à la tête du développement incessant des forces de production), dompte et étrangle la seule force qui puisse éviter la guerre. Le régime actuel, même après avoir égorgé le prolétariat, n’aura pas de paix, parce que chaque instant de sa vie et de son évolution n’est possible qu’en créant un contraste dans la personne du capitaliste concurrent, de l’État adverse, du monopole ou de la constellation d’États qui surgit en opposition.

Il n’aura pas de paix parce qu’il veut tourner aux fins de l’appropriation privée les forces de la production qui débordent les cadres de son régime et se dirigent vers la satisfaction des besoins non des individualités, mais des collectivités, parce que les institutions de classe des ouvriers ne peuvent pas servir indéfiniment les intérêts de la classe ennemie, mais ressusciteront de la guerre comme les bastions de la révolution. Et ces lois historiques nous permettent de comprendre que socialistes, centristes, démocrates et fascistes sont tous les prisonniers de ces mêmes forces qu’ils ont engendrées; eux qui, au travers de la violence et de la corruption, ont étranglé le prolétariat, ne peuvent que tomber dans la guerre.

( ... )

 

Prolétaires de tous les pays!

 

Aujourd’hui se répète la manoeuvre de 1914 et on vous appelle à vous battre pour la démocratie contre la dictature: dans les faits on vous appelle à épouser la cause de vos impérialismes. Vous pourrez vous opposer à la guerre en lançant des mouvements de classe sur la base de vos organisations syndicales de masse. Une telle bataille ne peut se résoudre qu’en opposant la révolution à la guerre. La révolution ne pourra triompher qu’en faisant du parti de classe le guide des mouvements insurrectionnels. Si vous ne réussissez pas à déclencher ces mouvements de classe, la guerre est inévitable et sa transformation en guerre civile n’est possible que par la reprise de os mouvements de classe pour la défaite de tous les Etats qui vous auront jeté dans la boucherie mondiale.

Préparez-vous à combattre contre toutes les patries: la fasciste, la démocratique, la soviétique. Votre lutte est la lutte pour l’Internationale, pour la révolution.

Pour la victoire révolutionnaire vous exclurez de vos rangs les traîtres socialistes et centristes qui en brisant votre front révolutionnaire ont préparé les prémisses pour la guerre et qui se mettront à la tête des forces pour vous faire accepter la cause du capitalisme: la cause de la guerre.

En Italie et en Allemagne comme en Angleterre et en France, comme en Russie et en Abyssinie, dans tous les pays vous lutterez en vous dirigeant vers la transformation en guerre civile de la guerre impérialiste. C’est seulement en vous plaçant dans cette direction que vous serez en mesure de profiter des situations révolutionnaires qui seront engendrées par l’éclatement du contraste insoluble et de classe constitué par le bloc des ouvriers et de la bourgeoisie pour la guerre, bloc provisoire qui n’a été rendu possible qu’à cause de la trahison des socialistes et des centristes, bloc qui débouchera d’autant plus vite et d’autant plus sûrement sur la victoire de la révolution que plus active et déterminée sera l’effort du prolétariat pour créer les Fractions de gauche, prémisse historique et théorique indispensable pour le parti, pour l’Internationale de la révolution.

 

Vive la transformation en guerre civile de la guerre impérialiste!

Vive la Fraction italienne de la Gauche Communiste!

Vive l’Internationale! A bas toutes les patries!

Vive la révolution communiste mondiale!

 

Le Congrès de la Fraction Italienne de la Gauche Communiste

 


 

(1) Manifeste publié su Bilan n°23 (septembre-octobre 1935). Cf. http://www.collectif-smolny.org/ article.php3? id_article=1248

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

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