Répression anti-prolétarienne et tentatives d’organisation indépendante à Gaza

(«le prolétaire»; N° 478; Septembre-Octobre 2004)

 

 

A la rentrée scolaire au début du mois de septembre, une manifestation de chômeurs à Khan Younis (Gaza) organisée pour protester contre le refus des autorités d’accorder, malgré les promesses, la gratuité de l’enseignement à leurs enfants et où se firent jour des revendications pour l’emploi et contre les hausses de salaires que se sont généreusement attribués les hauts fonctionnaires palestiniens, s’est heurtée à une violente répression policière: grenades lacrymogènes mais aussi tirs d’intimidation à balles réelles auxquels répliquèrent par des jets de pierre les chômeurs et leurs enfants. Les affrontement auraient duré pendant plusieurs heures. A l’annonce de cette répression des manifestations de travailleurs et chômeurs ont eu lieu dans le nord de la bande de Gaza, dans les camps de Beit Lahia et Jabalya.

Les chômeurs avaient dressé depuis la veille une tente devant l’immeuble du gouverneur, (représentant officiel du Premier ministre Mahmoud Abbas) et ce haut personnage n’avait pas toléré de se faire insulter par ces derniers.

Ces manifestations ont été appelées par une jeune organisation qui a pris le nom de «Comités Ouvriers indépendants» et qui dénonce la passivité complète des syndicats officiels. Cette organisation qui s’est formalisée l’année dernière, est née des suites du mouvement des chômeurs - surtout des prolétaires ayant perdu leur emploi en Israël - qui il y a 3 ans avaient dressé des tentes de protestation dans différents endroits de la bande Gaza et dont nous avions rendu compte (1).

Ces Comités Ouvriers Indépendants qui affirment compter plusieurs milliers d’adhérents dans tout Gaza, ont indubitablement réussi à avoir une certaine audience, à en juger par la grande manifestation de plusieurs milliers de travailleurs qu’ils ont réussi à organiser à la fin mars devant le siège du Conseil législatif palestinien (manifestation complètement passée sous silence par les médias internationaux). A la suite de cette manifestation, le syndicat officiel (PGFTU) avait envoyé une lettre de dénonciation de ces Comités aux services de sécurité palestiniens dont voici quelques extraits:

«Salut patriotique! (...) Nous voudrions vous informer que les soi-disant Comités ouvriers indépendants sont en liaison avec le Centre pour la Démocratie et les Droits Ouvriers de Dahman ainsi qu’avec le mouvement Hamas et l’Initiative Nationale Palestinienne de Mustapha Barghouti, et ce qui est étrange en la matière, c’est qu’il sont fait auprès du ministère de l’Intérieur une demande de reconnaissance comme organisation ouvrière palestinienne d’assistance. Nous voudrions vous informer que la Fédération Générale Palestinienne des syndicats a refusé de les enregistrer (...)». Suit une liste de noms de responsables de ces Comités.

«Les comités rassemblent des gens du Hamas, du Front Populaire et des transfuges du Fatah. Il vaut la peine de mentionner qu’ils n’ont reçu aucun permis du ministère de l’Intérieur et qu’ils publient des communiqués de presse et organisent des manifestations sans autorisation. Chacun sait que du vandalisme a été commis au Conseil législatif palestinien par la dernière manifestation organisée par la Comités ouvriers indépendants le samedi 12/3/2005 (...). Nous espérons que vous prendrez les mesures nécessaires à ce sujet dans l’intérêt de nos travailleurs et du mouvement syndical palestinien.

Commentaire: Nous voudrions vous informer que selon la loi sur les syndicats et le statut constitutionnel de ces derniers, les comités ouvriers sont par définition des comités établis sur les lieux de travail pour servir de lien entre l’employeur et le syndicat dont ils font partie. Les Comités ouvriers indépendants sont politisés, ils sont une organisation illégitime et se trouvent en violation avec la loi sur les syndicats» (2).

Ces syndicats officiels dont on voit ici clairement le caractère policier et qui revendiquent fièrement le rôle collaborationniste, sont financés directement par l’Autorité palestinienne, mais aussi par l’impérialisme international à travers d’organismes comme le Bureau International du Travail, des structures de l’ONU ainsi que des centrales syndicales collaborationnistes appartenant à la CISL (Confédération Internationale des Syndicats Libres, organisme autrefois mis en place par l’impérialisme étasunien pour chapeauter les syndicats opposés à l’influence stalinienne), comme l’AFL-CIO américaine ou la CFDT française.

Face à ce genre de syndicats, le besoin pour les prolétaires de disposer d’authentiques organisations de classe est à l’évidence fortement ressenti en Palestine et ces Comités tentent, à leur façon, d’y répondre.

Mais pour que cette réponse soit fructueuse, les prolétaires palestiniens devront, comme tous les prolétaires du monde, emprunter la voie de la réorganisation classiste, y compris sur le terrain politique, sur le terrain du parti de classe. Et pour commencer, ils devront réussir à résister à toutes les pressions, non seulement d’ennemis ouverts comme les bonzes de la PGFTU ou les bourgeois de l’Autorité et des grandes familles palestiniennes, mais aussi des faux amis qui cherchent à les entraîner dans leur orbite: à commencer par le Hamas qui a fait des offres d’union aux Comités, en continuant par le réformiste Mustapha Barghouti pour qui les Comités avaient appelé à voter lors de la récente élection présidentielle, sans oublier les démocrates de toute espèce (anciens ou toujours membres du Parti Communiste palestinien ou du Front Populaire) toujours prompts à offrir leurs services jamais gratuits, ni même... certaines officines étrangères expertes en manipulations les plus diverses (3).

Les obstacles sont nombreux mais ils ne pourront à la longue empêcher le prolétariat en lutte de retrouver ses armes de classe!
 



(1) Voir «Le Prolétaire» n° 463.
(2) Communiqué du «Democracy and Workers Rights Center in Palestine», 30/3/2005.
(3) Nous avons trouvé dans certaines publications de soutien au gouvernement israélien des appréciations positives des Comités ouvriers indépendants!
 

Particommuniste international

www.pcint.org

 

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