A propos de la «liberté de la presse»

(«le prolétaire»; N° 507; Avril - Mai 2013)

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Le 3 mai dernier était célébré la journée mondiale pour la liberté de la presse (instituée par l’ONU en 1993). A cette occasion l’association «Reporters sans Frontières» - dont on sait qu’une partie de son financement vient de la CIA (1) – a lancé une campagne «radicale» (dixit Le Monde) pour épingler 5 des 39 «prédateurs» de la liberté de la presse qu’elle a recensés: les dirigeants de la Corée du Nord, de la Syrie, de l’Iran, de la Russie, de la Chine et de l’Egypte.

De son côté, Laurent Fabius a fait une émouvante déclaration sur la liberté de la presse, où il a rendu hommage aux 2 journalistes français tués en Syrie (2).

Quant à nous, nous dédions à tous les démocrates qui s’extasient de la liberté de la presse régnant dans nos pays à la différence de ces contrées barbares, les lignes qui suivent:

«Journaliste, je dépends de ceux qui possèdent les journaux (...). Le joug est léger (...).

Attendre des représentants du capital qu’ils vous fournissent gracieusement des armes - c’est-à-dire en l’occurrence des journaux - pour s’élever contre une forme de société qui leur convient, et une morale qui est la leur, cela porte un nom: l’imbécillité.

Mais la plupart de ceux qui travaillent dans les grands journaux sont, en gros, d’accord avec cette société et cette morale. Ils ne sont pas achetés, ils sont acquis. La nuance est importante.

Ceux qui ne le sont pas, peuvent en théorie, créer d’autres organes pour exprimer leurs vues.

En pratique, les fonds nécessaires à la création d’une telle entreprise ne se trouvent pas dans les poches des révolutionnaires».

Celle qui a écrit ces lignes en 1960, c’est Françoise Giroud (3); elle savait de quoi elle parlait, puisqu’elle dirigeait alors l’hebdomadaire l’Express (créé par Servan-Schreiber), après avoir dirigé Elle: il faut être imbécile pour ne pas voir que dans les démocraties où elle existe, la liberté de la presse vantée par l’ONU ou Reporters sans Frontières ne vaut que pour les capitalistes, pour ceux qui possèdent les moyens de communication!

Sans le savoir, la bourgeoise patronne de presse confirmait ce que l’Internationale Communiste avait dit aux prolétaires du monde entier lors de son Premier Congrès en 1919:

«La liberté de la presse est également une des grandes devises de la “démocratie pure”. Encore une fois les ouvriers savent, et les socialistes de tous les pays l’ont reconnu des millions de fois, que cette liberté est un mensonge (...) tant que subsiste le pouvoir du capital sur la presse, qui se manifeste dans le monde entier d’une manière d’autant plus brutale, éhontée, cynique que la démocratie et le régime républicain sont plus développés, comme par exemple en Amérique. (...)

Les capitalistes appellent liberté de la presse la faculté pour les riches de soudoyer la presse, la liberté d’utiliser leurs richesses pour fabriquer et falsifier ce qu’on appelle l’opinion publique. Encore une fois, les défenseurs de la “démocratie pure” s’avèrent en réalité les défenseurs du système le plus ignoble, le plus vénal, de la domination des riches sur les moyens d’éducation des masses; ils trompent le peuple et le détournent, à l’aide de phrases pompeuses et spécieuses, fausse de bout en bout, de la tâche historique, de la tâche concrète de délivrer la presse de son asservissement au capital.

La liberté et l’égalité véritables régneront dans le régime édifié par les communistes où il sera impossible de s’enrichir aux dépens d’autrui, où il sera matériellement impossible de soumettre directement ou indirectement la presse au pouvoir de l’argent» (4).

 


 

(1) http://www.monde-diplomatique.fr/2007/07/CALVO_OSPINA/14910.

(2) Mais il n’a pas évoqué le sort, dont on reparle en ce moment, du journaliste J.P. Couraud disparu en 1997 à Tahiti après avoir enquêté sur le sénateur chiraquien Gaston Flosse, alors (et à nouveau!) président de cette région: cela s’est passé, il est vrai, à l’intérieur des frontières de la démocratique France... cf  Le Monde du 13/3/13.

(3) cf «Histoire d’une femme libre», Ed. Gallimard 2013, p. 57.

(4) «Thèses sur la démocratie bourgeoise et la dictature prolétarienne», point 8.

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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