Après le cessez-le feu à Gaza, l’oppression continue. La lutte continuera aussi!

(«le prolétaire»; N° 512; Juillet- Septembre 2014)

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L’intervention militaire israélienne à Gaza s’est donc terminée par un cessez-le-feu à la suite de quelques concessions du gouvernement d’Israël (consistant à revenir au statu-quo ante: réouverture partielle des points de passage à la frontière de la bande de Gaza, levée d’une diminution de la zone de pêche) et sans aucun doute de garanties du Hamas et du Djihad Islamique, les 2 organisations participant aux négociations indirectes avec le gouvernement israélien, sur le «maintien de l’ordre» dans le Territoire.

Dans les faits le blocus de la bande de Gaza (instauré par Israël et l’Egypte avec l’accord des impérialismes américain et européens, lors de l’arrivée au pouvoir du Hamas en 2007) s’est à peine allégé alors que ses effets ont été renforcés par la destruction des tunnels de contrebande (qui permettaient de le contourner en partie en faisant arriver des produits indispensables à la vie des habitants) par l’Egypte (et accessoirement par les bombardements israéliens).

Le Hamas a célébré le cessez-le-feu comme une «victoire». Mais de quelle victoire s’agit-il? Sanglante démonstration de l’écrasante supériorité militaire israélienne, en 51 jours il y a eu 2140 morts parmi les Palestiniens (essentiellement des civils victimes des bombardements), contre 72 morts du côté israélien (à peu près tous des militaires tués lors de l’invasion terrestre de Gaza). Selon les chiffres de l’ONU, près de 500.000 habitants ont dû quitter leurs habitations durant l’intervention israélienne (soit près du tiers de la population); plus de 50 000 logements palestiniens ont été complètement détruits ou sont devenus inhabitables (5 fois plus que lors de la précédente agression israélienne), 220 écoles, 58 hôpitaux et cliniques ont été plus ou moins gravement endommagés de même que les réseaux d’eau et d’électricité. Des centaines d’«entreprises» ont été touchées, l’agriculture a subi des pertes sévères. Si le blocus n’est pas levé, estiment les institutions onusiennes, il faudra au moins 15 ans pour reconstruire et réparer les dommages...

Certes le prestige du Hamas s’est accru au niveau international pour avoir tenu tête à Israël; mais en réalité les autorités israéliennes ne voulaient pas détruire cette organisation. Leur but était de lui faire comprendre par la force (ainsi qu’à son petit allié, le Djihad Islamique) qu’il devait, sous peine de mort, empêcher l’action à Gaza des groupes «incontrôlés»; mais il s’agissait aussi de terroriser la population palestinienne en général (pas seulement à Gaza) pour la dissuader de se lancer dans une nouvelle Intifada, selon ce que disaient des responsables israéliens eux-mêmes.

D’ailleurs Israël est si peu «battu» qu’alors que des négociations doivent s’ouvrir pour transformer le cessez-le-feu en un accord plus durable, son gouvernement a fait savoir de la manière la plus claire qu’il n’entendait en rien renoncer à sa politique de colonisation: il a décidé la plus grande confiscation de terres palestiniennes depuis 30 ans (en s’appuyant sur une loi recopiée de la législation ottomane du XIXe siècle!) pour édifier une nouvelle colonie (1)...

Il n’est cependant pas sûr que cette énième sanglante intervention israélienne ait davantage d’effet sur les masses palestiniennes que les précédentes. Il ne s’est pas agi cet été, comme l’a écrit sans sourciller un digne représentant de l’indifférentisme euro-centrisme d’une «crise entre Hamas et Israël: la barbarie de deux nationalismes continue» (2), mais d’une manifestation particulièrement bestiale de l’oppression par Israël des populations palestiniennes, oppression qui s’exerce en permanence dans tous les domaines de la vie sociale même quand il n’y a pas d’état de guerre.

Face à cette oppression nationale, face à ce colonialisme, comme face à l’exploitation capitaliste qu’elles connaissent aussi, les masses palestiniennes se retrouvent tragiquement seules. Suivant avec empressement l’exemple américain, les démocratiques impérialismes occidentaux ont entériné les attaques israéliennes à Gaza avec cet argument: «Israël a le droit de se défendre» (3); par la bouche de Poutine, la Russie, qui, il n’y a pas si longtemps jouait à l’amie des Palestiniens, a repris exactement le même raisonnement (4): pour les gangsters impérialistes, les oppresseurs ont bien évidemment le droit de se défendre contre les opprimés!

Les Etats arabes sont restés silencieux, l’Egypte d’Al Sissi remplissant sans hésiter son rôle d’allié d’Israël, y compris en interdisant toute manifestation de solidarité avec Gaza. Même l’Iran, soutien traditionnel du Hamas, n’a protesté que tardivement et du bout des lèvres.

Cette nouvelle Sainte Alliance a laissé les mains libres à Israël pour perpétrer ses crimes: dans un Moyen-Orient troublé et en pleine recomposition, le sort des masses palestiniennes est le cadet des soucis des bourgeois et des impérialistes...

Démonstration est une nouvelle foi faite que les prolétaires et les masses déshéritées palestiniennes ne peuvent trouver un soutien auprès d’Etats ou de partis bourgeois. Même le Hamas qui exhibe ses martyrs pour démontrer qu’il n’a rien à voir avec les valets d’Israël que sont les dirigeants de l’Autorité Palestinienne, ne cherche qu’à faire reconnaître officiellement par Israël et les impérialistes son rôle de garde-chiourme à Gaza.

Seul le prolétariat international, en renouant avec la lutte révolutionnaire contre le capitalisme et l’ordre impérialiste mondial, pourra apporter une aide décisive aux prolétaires et aux masses de Palestine, comme des autres régions aujourd’hui écrasées sous le talon de fer de l’impérialisme.

Si éloignée semble-t-elle, c’est là la seule perspective réaliste pour briser l’isolement tragique des prolétaires de ces régions et mettre fin à la série interminable de massacres qui dure depuis des décennies.

 


 

(1) L’organisation pacifiste israélienne «La Paix Maintenant» se lamente que cette décision est un «coup de poignard dans le dos» des «modérés» de l’«Autorité Palestinienne» de Mahmoud Abbas car ceux-ci aurait été prêts à accepter cette colonisation... mais seulement à l’issue des négociations à venir. cf Libération, 2/9/14. Mais depuis quand un maître prend-il en compte les desiderata de son valet?

(2) Tendenza Comunista Internazionale (Battaglia Comunista) , 12/7/14. Pour Battaglia Comunista la différence entre le nationalisme des oppresseurs et celui des opprimés que, selon Lénine, il ne faut jamais oublier si l’on ne veut pas tomber dans l’ «économisme impérialiste», n’existe pas car c’est rien moins que l’oppression israélienne qu’elle fait disparaître!

On peut retrouver une position similaire chez Il Partito Comunista qui écrit: «Prolétaires palestiniens et israéliens sont ainsi maintenus comme des rats dans une cage, dans le minuscule ghetto coincé entre le Jourdain et la mer, ivres d’idéologie patriotique et de sang, dans un jeu cynique et impitoyable entre les plus grands impérialismes», Il Partito Comunista n°366, 20/7/14. Il PC ne semble pas s’être avisé qu’il existe une «petite» différence entre la situation des prolétaires souffrant de conditions de vie et de travail terribles dans une bande de Gaza soumise à un blocus depuis des années, bombardée et attaquée à intervalles réguliers, et celle des prolétaires israéliens (d’autant plus s’ils ne sont pas Arabes) à qui leur bourgeoisie peut concéder des avantages, en quelque sorte comme prix et garantie de leur soutien à l’oppression des Palestiniens. C’est pourquoi Il PC peut terminer sa prise de position en écrivant que ce que redoutent le plus les bourgeois israéliens et palestiniens, c’est.. la formation de syndicats de classe, réunissant Palestiniens et Israéliens, et opposés aux deux nationalismes! En fait tant que les prolétaires de la nation oppresseuse (Israël) ne rompront pas avec la collaboration de classe qui les rend complices d’une oppression exercée en leur nom, les appels à l’unité entre les prolétaires ne pourront pas se concrétiser.

(3) Le gouvernement socialiste français s’est distingué en étant le seul à interdire plusieurs manifestations pro-palestiniennes à Paris. Il n’a autorisé que les manifestations des organisations social-impérialistes (PCF, FG, CGT, etc.) où fleurissaient les drapeaux tricolores et qui demandaient que telle ou telle mesure contre la politique israélienne soient prises par le gouvernement – comme si celui-ci n’avait pas clairement dit dès le début qu’il soutenait Israël!           

(4) Israël Magazine, 15/7/14.

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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