La NUPES: une nouvelle union électorale anti-prolétarienne

(«le prolétaire»; N° 544; Mars - Juin 2022)

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Stabilité électorale et recomposition du theâtre politique bourgeois

 

Merveille du système démocratique électoral! En dépit des crises politiques et sociales qui ont marqué le quinquennat qui vient de s’achever – du mouvement des Gilets Jaunes aux grandes luttes contre la réforme des retraites, sans oublier le renforcement sans précédent du totalitarisme bourgeois avec le confinement de dizaines de millions de personnes et la gestion autoritaire de la lutte contre la pandémie (licenciements du personnel hospitalier non vacciné, etc.) – les élections présidentielles se sont en définitive terminées comme les précédentes, avec la victoire annoncée de Macron face à Marine Le Pen et une augmentation de l’abstention moins forte que redoutée.

Une nouvelle fois l’ex-FN maintenant RN, a servi à canaliser nombre d’électeurs, en particulier «de gauche», vers le soutien au candidat bourgeois destiné à gouverner, le président sortant, au nom d’une imaginaire «menace fasciste». Rien n’a manqué à ce scénario bien rodé, y compris des manifestations de rue contre Le Pen à l’appel des partis de gauche, de la CGT, du NPA, de l’UNEF, etc. S’il en était besoin, le co-président du MRAP a expliqué le sens de ces manifestations: «on ne dit pas 'votez Macron', mais ça revient à ça» (1).

C’est l’écho dérisoire de la funeste tactique de «l’antifascisme démocratique». Dans les années trente du siècle dernier, lorsque la menace fasciste bien réelle représentait une menace mortelle, cette tactique a paralysé les prolétaires en les appelant à s’unir aux bourgeois «démocrates» et à défendre l’Etat bourgeois démocratique; complètement désarmé par cette alliance avec l’ennemi de classe, même appelé «démocratique», le prolétariat qui avait abandonné dans cette alliance ses armes de classe, fut une proie facile pour la contre-révolution bourgeoise. Contre le fascisme seule la lutte révolutionnaire anticapitaliste menée sur une base indépendante de classe peut être victorieuse.

Aujourd’hui, il n’existe pas de menace fasciste, car le système démocratique assure sans aucun problème le maintien du capitalisme et de l’ordre bourgeois. Même si elle a mis de l’eau dans son vin, l’arrivée de Le Pen au pouvoir signifierait sans aucun doute une aggravation de la politique bourgeoise antiprolétarienne, raciste et répressive; elle signifierait aussi une aggravation des tensions politiques, sans compter que la formation d’un gouvernement souverainiste d’extrême droite gênerait les ambitions impérialistes françaises en Europe. C’est pourquoi les cercles bourgeois décisifs y sont opposés: la politique menée par Macron répond parfaitement à leurs besoins et il réussit en outre à surmonter les crises qui se succèdent!

La réédition à l’identique du match Macron - Le Pen du deuxième tour des présidentielles, ne peut pas masquer les changements du théâtre politique bourgeois; le principal est l’effondrement des deux grands partis politiques qui ont été les piliers de la stabilité politique en France depuis quarante ans, le PS et le parti gaulliste (sous ses diverses appellations). Les analystes politiques parlent parfois à ce sujet de «fatigue démocratique» alors qu’il s’agit de l’usure de partis dits «de gouvernement» qui ont mené des politiques substantiellement identiques, en contradiction avec leur opposition proclamée.

A leur place se constitue un nouveau parti bourgeois de gouvernement, entre autres plus sensible  aux secteurs capitalistes les plus libéraux et moins aux «pouvoirs intermédiaires», «En Marche» qui se disait «et de gauche et de droite» – sans doute parce qu’il s’est fondé avec des responsables venus des deux bords...

Mais la stabilité politique ne peut être assurée par la seule dualité En Marche - extrême droite; le RN a beau se présenter comme le premier «parti ouvrier» et mettre des revendications sociales dans son programme, il reste largement étranger au prolétariat comme le démontre son absence lors des luttes ouvrières. Le maintien de l’ordre bourgeois est précaire en l’absence d’une force politique dont la victoire électorale est possible pour détourner les prolétaires de la lutte ouverte contre les capitalistes et leur Etat. C’est exactement ce vide qu’entend combler la France Insoumise: Mélenchon n’a-t-il pas déclaré que sa victoire rendrait inutiles les luttes et les manifestations?

 

Une nouvelle «union de la gauche» ?

 

Après les présidentielles et le bon score de Mélenchon, arrivé troisième (ce qu’il n’avait pu réaliser il y a 5 ans), une union électorale s’est donc constituée, la «Nouvelle Union Populaire Ecologiste et Sociale». La NUPES se veut une nouvelle «Union de la Gauche» constituée en 1972 entre le PS, le PCF et le Parti Radical.

Mais les choses sont bien différentes. Créée après la déroute électorale du ¨PS lors des élections présidentielles de 1969 (5% des voix), l’Union de la Gauche avait l’objectif de présenter une alternative aux luttes ouvrières de l’après grève générale de mai-juin 1968. Elle s’appuyait sur la forte présence du PCF dans les entreprises et les syndicats qui y faisait la chasse aux ouvriers combatifs, dénoncés comme «gauchistes»; «une seule solution le programme commun!» était alors le slogan de cette union qui prétendait qu’un gouvernement de gauche prendrait des mesures anticapitalistes conformément à ce programme. Les organisations d’ «extrême» gauche apportaient leur soutien –«critique» bien sûr!– à cette union anti- prolétarienne.

La NUPES d’aujourd’hui n’a pas la force de l’Union de la gauche dans le prolétariat dont elle pourra  plus difficilement brider les luttes: sa faiblesse principale est qu’elle est en réalité une alliance purement électorale qui en dépit des fanfaronnades de Mélenchon vise essentiellement à sauver les sièges des députés de gauche sortants.

 Comme autrefois elle est soutenue par nombre de prétendues organisations d’extrême gauche, à commencer par les trotskystes lambertistes du POI qui prêtent leur local parisien et qui d’ailleurs pratiquent l’entrisme au sein de LFI. Le NPA avait négocié pour intégrer cette union; mais il a rompu les négociations après le refus de la NUPES d’accorder une investiture à Poutou (il appelle quand même à voter pour elle) (2).

Comme autrefois son programme mélange poudre aux yeux à destination des prolétaires et assurance de défense des intérêts capitalistes et impérialistes  destination des bourgeois et des petits bourgeois.

Comme autrefois elle veut redonner sa crédibilité au cirque électoral (Mélenchon se vante d’avoir ramené des abstentionnistes vers les urnes) et à la démocratie bourgeoise.

Comme autrefois c’est une union antiprolétarienne qu’il est nécessaire de démasquer et de combattre: le salut des prolétaires ne viendra pas des urnes, mais de la lutte de classe poussée jusqu’à la prise révolutionnaire du pouvoir et l’instauration de la dictature du prolétariat, indispensable pour révolutionner de fond en comble la société!

 


 

(1) https://www.france24.com/fr/france/20220416-pr%C3%A9sidentielle-un-samedi-de-manifestations-contre- l-extr%C3%AAme-droite-en-france

(2) La «tendance claire» du NPA, qui se prétend révolutionnaire, avait appelé à voter Mélenchon dès le premier tour.

 

 

Parti communiste international

www.pcint.org

 

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