L’éternel confusionnisme politique du CCI

A propos d’un « Appel de la Gauche communiste » contre la démocratie

(«le prolétaire»; N° 554; Août-Sept.-Oct. 2024)

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Nous avons reçu du CCI une proposition d’un appel commun intitulé: «Appel  de la Gauche Communiste à la classe ouvrière contre la campagne internationale de mobilisation pour la démocratie bourgeoise» (30/08/2024).

Cette proposition a été également envoyée à la TCI (Tendance Communiste Internationale, regroupement autour de l’italienne Battaglia Comunista et de la CWO britannique), à différentes organisations se réclamant de notre courant (Il Partito Comunista, Il Programma Comunista), plus à un groupe en Suède (Internationalist Voice) et un autre en Italie (Istituto Onorato Damen).

Que dit cet appel?

Pour résumer, il dénonce le fait que la mascarade électorale n’est qu’une feuille de vigne servant à camoufler la dictature du capital, et que la classe ouvrière est appelée à faire un faux choix « entre ceux qui prétendent respecter les protocoles démocratiques établis de l’État bourgeois et ceux qui, comme la droite populiste, traitent ces procédures avec un mépris ouvert, plutôt qu’avec le mépris dissimulé des partis démocratiques libéraux ».

Le tapage autour de la démocratie sert à rendre impossible à la classe ouvrière la défense de ses intérêts de classe et la quête de son propre  pouvoir politique. Ni les partis sociaux-démocrates, continue le texte, ni les héritiers du stalinisme ni les trotskistes ou le «courant anarchiste officiel» ne défendent les véritables intérêts de la classe ouvrière : ils ont tous hier donné un support critique à tel ou tel impérialisme et aujourd’hui « ils s’alignent de façon «critique» derrière la démocratie de gauche et libérale contre la droite populistes pour aider à démobiliser la classe ouvrière ». « Seule la Gauche Communiste, actuellement peu nombreuse, est restée fidèle à la lutte indépendante de la classe ouvrière depuis cent ans » (...).

Et le texte se termine ainsi:

« C’est pourquoi, face aux campagnes renouvelées des fausses alternatives des régimes capitalistes pour entraîner la classe ouvrière derrière la démocratie libérale ou le populisme de droite, entre le fascisme ou l’antifascisme, les différentes expressions de la Gauche Communiste, quelles que soient leurs autres différences politiques, ont décidé faire un appel commun à la classe ouvrière:

- A bas la supercherie de la démocratie bourgeoise qui cache la dictature du capital et de son militarisme impérialiste!

- Contre l’austérité de la démocratie capitaliste et l’intérêt national, pour la lutte de la classe ouvrière internationale pour défendre son niveau de vie,

- Pour la révolution de la classe ouvrière pour arracher la bourgeoisie du pouvoir politique, exproprier la classe capitaliste et en finir avec le conflit fratricide du prolétariat entre les Etats-nations rivaux ».

Indépendamment de la justesse ou non de ce qui y est dit cet appel est typique de l’attitude constante du CCI : chercher à regrouper, sous différents prétextes, les organisations appartenant à ce qu’il définit comme le « milieu révolutionnaire » ou la « gauche communiste » qui partageraient les mêmes positions fondamentales ; au printemps 2022 le CCI avait fait une proposition similaire à propos de la guerre en Ukraine (1). Pour lui ces organisations seront appelées à se regrouper demain dans un même parti et seul leur sectarisme empêche aujourd’hui de faire ce pas.

C’est une position cohérente avec son programme politique de base où il  se réclame des apports des « gauches allemande, hollandaise et italienne»  (2), c’est-à-dire de courants représentant une déviation par rapport au marxisme et du nôtre qui a toujours fait de la défense intransigeante du marxisme le point cardinal de son programme. Se revendiquer des « apports » des uns et des autres, c’est-à-dire vouloir faire une synthèse programmatique de positions opposées, est une conception confusionniste dans laquelle ne peuvent surnager que les positions les plus étrangères au marxisme. Ce dernier n’admet pas les « révisions » ou les « enrichissements » par lesquels on prétend l’adapter à des « situations nouvelles » ou l’« améliorer » par les enseignements du passé. Toutes les modifications, toutes les atteintes à l’intégrité du marxisme, quelles que soient les intentions de leurs auteurs, n’aboutissent qu’à briser sa force révolutionnaire, sa capacité à analyser le capitalisme et à guider la lutte prolétarienne.

Le confusionnisme  qui est au cœur de son programme et qui se retrouve dans sa perspective de regroupement politique est à l’origine du dernier appel unitaire du CCI qui n’hésite pas à se revendiquer de Bordiga et de son article « Le principe démocratique » (3) ! Pourtant ce texte qui fait la critique dudit principe est aussi une défense du rôle du parti absolument étranger aux conceptions idéalistes du CCI qui le réduisent à un éclaireur des consciences.

Mais il s’agit d’impressionner les prolétaires éventuellement intéressés en présentant la « Gauche Communiste » comme un ensemble politiquement homogène, avec une filiation commune et une continuité ininterrompue depuis un siècle.

Or les différents groupes que le CCI voudrait rassembler dans son appel ont des positions différentes sur nombre de sujets, parfois cruciaux ; par exemple nous séparent du CCI des questions fondamentales comme celle du rôle du parti dans la lutte prolétarienne, la prise du pouvoir et la direction de la dictature du prolétariat, celle du rôle de l’Etat ou celle de la violence (4) : autant de points qui auraient empêché le CCI d’être admis dans l’Internationale Communiste. Passer sous silence ces divergences ou les considérer comme secondaires pour essayer d’être plus nombreux, revient à duper les prolétaires. Ceux-ci, encore plus dans la confusion politique régnante aujourd’hui, ont besoin avant tout de clarté.

Refuser d’adhérer à une  initiative politique confusionniste n’est donc pas du « sectarisme »; nous sommes toujours partisans d’un travail unitaire sur des positions de classe dans les luttes avec les prolétaires et les militants disposés à se situer sur des positions de classe, quelles que soient leurs positions politiques ou autres. Mais dénoncer la véritable supercherie que constitue cet appel unitaire, c’est le minimum indispensable pour préserver la délimitation et permettre la clarification nécessaires à la renaissance du parti de classe, organe irremplaçable du prolétariat pour son émancipation.

 


 

(1) Son argument était que l’on pouvait faire comme en 1915 où la conférence de Zimmerwald avait réuni les opposants à la guerre les plus divers, la gauche (bolcheviks) y étant minoritaire. Mais les situations étaient complètement différentes : à l’époque il s’agissait avant tout de montrer qu’après la faillite de l’Internationale qui avait assommé les prolétaires conscients, tous les socialistes n’avaient pas trahi et renié l’internationalisme. Singer aujourd’hui Zimmerwald signifierait renier la lutte des bolcheviks contre la confusion de Zimmerwald et pour le principe du défaitisme révolutionnaire – que justement le CCI rejette...

(2) cf. «Nos positions» sur chaque numéro des publications du CCI.

(3) Article publié sur Rassegna Comunista, organe théorique du Parti Communiste d’Italie, le 22/02/1922. cf. « Parti et classe », Textes du parti communiste international n°2.

(4) Pour une critique détaillée du CCI le lecteur peut se reporter à notre brochure: « Le CCI: à contre-courant du marxisme et de la lutte de classe », brochure Le Prolétaire n° 29.

 

 

Parti Communiste International

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