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Prises de position - Prese di posizione - Toma de posición - Statements                        


 

Petroplus : Comment le collaborationnisme et ses larbins stérilisent les luttes

 

 

La saga politico-médiatique et judiciaire de Petroplus n’en finit pas de ne pas finir. Le 5 novembre, à la surprise générale, Montebourg a sorti de sa manche un nouvel éventuel repreneur: l’Etat libyen via son fonds souverain créé par Kadhafi.

Cette raffinerie, créée en 1929, a appartenu au groupe Shell jusqu’en 2008 avant d’être revendue au groupe suisse Petroplus. Son existence était menacée depuis des années car les pétroliers ont décidé de fermer des raffineries vieillies en Europe au profit de sites dans les pays producteurs de pétrole, plus neufs, plus performants, moins coûteux. Fin décembre 2011, le groupe Petroplus a annoncé la fermeture de l’usine de Petit-Couronne et, en pleine campagne présidentielle, la situation de ses salariés a été très médiatisée.

La lutte des raffineurs contre les licenciements montre une fois de plus le rôle anti-prolétarien du collaborationnnisme et de ses larbins.

 

De la CGT à l’ «extrême» gauche, tous ensemble pour le «patriotisme économique»

 

La mobilisation des travailleurs de Petroplus a été très rapidement orientée vers l’impasse du chauvinisme. Dès le départ, la CGT a dénoncé les importations étrangères de pétrole raffiné et les risques pour « l’indépendance énergétique » de la France. Sans surprise, la CFDT partage la même ligne car,pour elle, «le plus important est d’assurer notre sécurité et indépendance énergétique et de préserver le savoir-faire et les emplois» (déclaration de la secrétaire générale de l’UIS Rouen-Elbeuf, 24 octobre).

Après l’annonce de la liquidation (et comme en début d’année), l’intersyndicale CGT-CFDT-CGC a organisé un «blocage» du dépôt pétrolier Rubis. Pour les dirigeants de la CGT «Rubis importe des produits raffinés et contribue à la déchéance du raffinage français» (Info-luttes, bulletin de la CGT 76, 25 octobre). Pour la bonzerie syndicale, la solidarité de classe avec les prolétaires exploités dans les pays producteurs cède facilement la place à la défense de l’économie nationale.

Naturellement, cette politique nationaliste est reprise par le Front de gauche qui affirme dans un communiqué que « Pour son indépendance énergétique, le pays a besoin de ses raffineries. La France ne raffine pas assez aujourd’hui pour répondre à ses besoins de consommation. Importer, c’est exploiter des peuples à l’autre bout de la planète, c’est dégrader l’environnement à grande échelle.» (communiqué du FdG 76, 16 octobre) Quelle hypocrisie de la part des fervents soutiens du nucléaire (il y a six réacteurs nucléaires dans le département) basé sur le pillage de l’uranium du Niger ! Quelle cynisme lorsque l’on sait que la raffinerie de Petit-Couronne constitue depuis des années une nuisance et un risque pour les travailleurs qui habitent la partie Sud de l’agglomération rouennaise: les sols sont gorgés d’hydrocarbures, les rejets gazeux peuvent être sentis à une dizaine de kilomètres à la ronde.

Le PS local emboîte le pas. Guillaume Bachelay, député en remplacement de Fabius, dénonce les importations de carburant devant les salariés: «On nous dit qu’il y a surcapacité de raffinage mais elle vient des importations massives (40 %) de produits finis dans des pays en dehors de l’Europe » (Paris-Normandie, 19 octobre)

LO et le NPA n’ont pas repris ces positions chauvines sur Petroplus mais ces organisations n’ont à aucun moment dénoncé la nature réactionnaire de la campagne autour du protectionnisme menée par la CGT locale.

Sans dire un mot sur la stratégie chauvine de la CGT, les «anticapitalistes» accusent leurs concurrents du Front de Gauche:  «Du côté du Front de gauche, l’accent est mis sur la questions des importations, sur la nécessité de «raffiner français», sur l’indépendance nationale. Disons le tout net cette position est pour nous inacceptable surtout au regard de l’héritage colonialiste de la France, de pillage des matières premières, d’Elf et de la Françafrique?! » (Tout est à nous, 25 octobre).

Et ce même NPA n’hésite pas à prendre une position ouvertement protectionniste en réaction à l’ouverture d’une usine Renault à Tanger en déclarant  «Bien que l’Etat soit le premier actionnaire de Renault, Sarkozy n’a jamais envisagé d’imposer à Ghosn que tout investissement à l’étranger respecte les règles (salaires, conditions de travail,…) qui lui auraient été imposées en France, sous peine de sanctions.» (Bulletin NPA Renault-Cléon, 16 février).

D’autres courants trotskistes ont fait preuve d'encore moins de retenue. C’est évident pour les lambertistes ultra-chauvins du POI qui proposaient «un blocage immédiat de toute importation de carburant raffiné» (Informations Ouvrières, 12 janvier) et qui reproche au député Bachelay de ne pas être réellement protectionniste car il a voté pour le nouveau traité européen (Informations Ouvrières, 25 octobre). Ils ont été rejoints par la Gauche Révolutionnaire et la Riposte.

La GR est une organisation, essentiellement basée à Rouen, qui a intégré le NPA comme tendance «de gauche» lors de sa création avant de le quitter au début de l’année 2012. Elle est fondamentalement d’accord avec la ligne nationaliste de la CGT et présente la surcapacité du raffinage comme une conséquence des importations. (L’Égalité, janvier-février)

 La Riposte, courant trotskiste qui pratique l’entrisme dans le PCF, reprend la même rhétorique chauvine que ses compères. Elle reproche au gouvernement de ne pas défendre l’économie nationale: «on peut le dire, le gouvernement ne s’investit pas pour trouver un repreneur. Alors qu’il prône officiellement l’« indépendance énergétique», il ne lève pas le petit doigt face aux délocalisations des raffineries dans des pays où le «coût du travail» est plus faible – mais où on est certainement moins regardant en matière de sécurité, de conditions de travail et de pollution. L’argument du patronat selon lequel il y aurait une surcapacité de raffinage en France n’est pas recevable. Les chiffres sont sans appel. En 2009, 72,5 millions de tonnes ont été traitées, pour une consommation nationale de 80,8 millions, soit 8,3 millions de tonnes importées. En 2010, 16,1 millions de tonnes ont été importées et 41 millions en 2011» (www.lariposte.com, 3 mars)

La palme du jésuitisme revient cependant au Parti Communiste des Ouvriers de France.

Le PCOF, issu de l’ancien courant «pro-albanais», dénonce les campagnes nationalistes de la bourgeoisie autour du « patriotisme économique » en écrivant que «Ce slogan, “acheter français”, est une façon […] de nous faire oublier notre position et nos intérêts de classe pour nous convaincre que notre sort est lié aux sorts de nos entreprises et donc à leur défense, leur sauvetage, nous faire adhérer de façon indirecte à la défense et au renforcement du système d’exploitation capitaliste. Cette campagne […] vise à nous entraîner, du moins dans nos têtes, dans l’entreprise de sauvetage d’un système à bout de course». Pour Petroplus, elle présente les solutions nationalistes comme une «idéologie réactionnaire pour briser la résistance de la classe ouvrière» (La Forge, janvier).

Malgré ces déclarations, il n’est pas compliqué de constater la tartufferie de ces «marxistes-léninistes»: il suffit de lire les déclarations du Front de gauche que le PCOF a intégré. Fièrement, ce dernier proclame que «dès les années 80, [le PCF] prônait, bien seul, le “produire français” aujourd’hui repris unanimement par tous les candidats à l’élection présidentielle... Tant mieux!» (4 pages du FdG par les élections dans la 4e circonscription de Seine-Maritime, qui comprend Petit-Couronne). Ce Front de Gauche est un des fers de lance de la diffusion du nationalisme dans la classe ouvrière.

C’est au nom de cette défense de «l’indépendance énergétique» de la France et de sa «réindustrialisation» que les prolétaires ont été lancés à la recherche d’un nouveau patron.

 

L’intersyndicale et la CGT à la recherche d’un nouvel exploiteur

 

Il est vrai que de nombreuses actions ont été menées à destination d’autres entreprises, en particulier une manifestations devant l’entrée de l’usine Renault-Cléon, mais aussi des manifestations dans Rouen ou des blocages de péage en commun avec les travailleurs d’une usine de pâte à papier M’Real menacée de fermeture. Mais celles-ci restaient avant tout des «coups médiatiques» pour faire pression sur les gouvernements successifs et les politiciens de tous bords. Le seul objectif fixé à la lutte a été la recherche d’un repreneur. Fin février, la CGT semble avoir obtenu ce qu’elle voulait : Shell a signé un contrat de «processing» pour que Petroplus raffine du brut fourni par Shell. Une première victoire... pour les bureaucrates.

Ensuite, selon Le Monde, «les représentants syndicaux ont remué ciel et terre, contactant 42 repreneurs potentiels, du Texas au Kazakhstan, multipliant les rendez-vous à Bercy». (lemonde.fr, 27 septembre) L’intersyndicale a finalement réussi à trouver deux repreneurs : NetOil et APG. «Ces groupes restent des acteurs de troisième zone du monde pétrolier, dont la crédibilité reste à démontrer», écrivait, en août, un article du Monde. Le groupe APG, basé à Hong Kong est, pour sa part, accusé de ne pas jouer la transparence. Impossible de savoir l’étendue de ses actifs et l’état de ses comptes selon le quotidien. «A l’inverse, Roger Tamraz, l’homme fort de NetOil, serait, plutôt... trop connu. Il traîne une odeur de soufre. Son nom a été cité dans plusieurs scandales bancaires et boursiers»  (Le Monde, 24 août 2012).

Le 5 novembre – date limite de dépôt des propositions de reprise – , Montebourg a annoncé que l’Etat libyen serait intéressé.

La déclaration, en février, du représentant de l’intersyndicale, dominée par la CGT, montrait clairement le caractère néfaste de cette quête d’un nouvel exploiteur: «A nous maintenant de montrer que notre raffinerie est viable et qu’elle a les meilleurs rendements»  (lemonde.fr, 20 février). Cette annonce a été suivie d’effets. Pour convaincre les repreneurs, l’intersyndicale souhaite éviter toute agitation sociale.

C’est évident quand elle organise une parodie de grève le 5 novembre. Selon le blog des salariés de la raffinerie, l’intersyndicale appelle à une grève de 24 heures, reconductible, dans les raffineries et dépôts de carburant de France, mais le leader de la CGT de l’entreprise déclare «Nous continuerons à faire tourner des unités avec des personnes réquisitionnées. Ce n’est pas le moment d’arrêter la production, la situation est trop fragile. Tous les autres employés seront en grève.»

Nous sommes loin d’une grève qui s’attaque au profit capitaliste en bloquant la production! C’est une nouvelle action de lobbying en direction de la justice et des politiciens bourgeois. Elle s’accompagne d’ailleurs d’une journée «ville morte» organisée par les mairies de Petit et de Grand-Couronne en commun avec l’Union des commerçants (Liberté Dimanche, 4 novembre).

La paix sociale maintenue par les syndicats dans l’usine semble être une «réussite». Cela a permis à Mélenchon de s’exclamer «En ce moment Pétroplus qui n’a plus ni actionnaire, ni patron a été remis en route par les ouvriers. Ceux-ci ont dû pour y arriver surmonter d’innombrables problèmes techniques. Mais la raffinerie raffine! Et elle fait en ce moment beaucoup de profit compte tenu de la remontée du prix de l’essence. Quelle drôle d’histoire!»

De l’hebdomadaire régional du groupe Hersant jusqu’aux duettistes du Front de Gauche, tous sont d’accord: les ouvriers ont un «comportement responsable et constructif» (Liberté Dimanche, 4 novembre) et «ont démontré par leurs compétences que l’entreprise était viable et rentable» (communiqué du PCF, 16 octobre) et «que la poursuite du site était possible et rentable» (communiqué du PG, 16 octobre). Si c’est vrai, les travailleurs ont seulement montré aux bourgeois que les travailleurs pouvaient s’exploiter eux-mêmes encore plus que ne réussissaient à le faire les patrons.

La seule critique émise contre cette stratégie défaitiste vient du Comité NPA de Renault-Cléon. Son bulletin du 26 octobre distribué dans l’usine s’en prend (enfin !) à l’intersyndicale: «Si la situation n’était pas tragique, avec le risque de voir des centaines de familles se retrouver sur le carreau, on pourrait rire de l’attitude de l’intersyndicale de PETROPLUS. [...] les représentants de l’intersyndicale ont passé leur temps à vanter les mérites de l’entreprise NET OIL, candidate à la reprise du site [...]. Plus fort encore, elle signait la veille un communiqué commun avec NET OIL, dont il ne faut pas être un fin analyste financier, pour comprendre que ce repreneur n’est rien d’autre qu’un Bernard Tapis ou qu’un Lakshmi Mittal, patron d’Arcelor, qui vient d’officialiser la fermeture des hauts fourneaux de Gandrange». Il reproche également à celle-ci qu’ «A force de remettre la préparation de la bagarre à mener aux calendes grecques, c’est l’un des ténors du PS, Guillaume Bachelay, qui apparaît comme combatif alors que ses amis au gouvernement refusent de prendre les vraies mesures pour l’emploi».

Ce constat tardif – Vae Victis ! – ne remet pas en cause l’orientation réformiste du NPA et son suivisme servile par rapport à la CGT. La conclusion du NPA Cléon est en réalité tout aussi bourgeoise que celle de la bonzerie: «nationaliser sous le contrôle des travailleurs les entreprises qui licencient».

 

Le mythe de la «nationalisation sous le contrôle des travailleurs»

 

Face aux difficultés pour trouver un «repreneur» sérieux, la CGT a un second fer au feu: la prise de contrôle de l’entreprise par l’Etat. L’Union départementale réclame la «réquisition» de l’entreprise avec un argument dont la nullité le dispute à la pire servilité: «C’est ce qu’avait fait le précédent gouvernement, lors du conflit des retraites en 2010, en s’appuyant sur l’article 4101 du code pénal, pour briser la grève des salariés de la raffinerie de Grandpuits, au motif de l’intérêt national » (communiqué du 18 octobre). Pour sa part, la Fédération CGT de la Chimie appelle le gouvernement à «Préempter la raffinerie de Pétroplus Petit-Couronne comme premier pas vers une nationalisation complète du secteur de l’énergie» (communiqué du 16 octobre).

Le Front de gauche et l’ «extrême» gauche gauchissent cette revendication. Le Front de gauche revendique «dès maintenant, la réquisition et la nationalisation de la raffinerie sous contrôle social de la raffinerie, et ce, sous le contrôle des salariés eux-mêmes» (communiqué du FdG 76) et le PCF réclame une nationalisation «avec de nouveaux droits d’intervention pour les salariés et les citoyens» (communiqué du PCF, 16 octobre).

La GR demande rien de moins que la «Nationalisation sous contrôle et gestion des travailleurs du secteur de l’énergie, en lien avec la population» (gr-socialisme.org, 26 avril). La Riposte avance la même revendication étatiste et démocratique: la nationalisation «sous le contrôle démocratique des travailleurs [qui] ont prouvé que la classe ouvrière organisée peut gérer de façon rationnelle [sic!] son outil productif.» (www.lariposte.com, 3 mars)

Dans un communiqué, le NPA propose une solution différente mais tout aussi capitaliste: «Le gouvernement français peut contraindre Shell à reprendre Petroplus Petit-Couronne et l’ensemble de ses salariés, sous la menace de la réquisition de ses biens et de ses avoirs en France, sous la menace du remboursement de toutes les aides publiques… » (communiqué du NPA, 16 octobre) L’objectif final étant la création d’un «service public de l’énergie, après réquisition de tous les grands groupes comme Total ou Shell», cela devant permettre que «La production et la distribution de l’ensemble de l’énergie [soient] indépendantes… de la loi du profit » (Tout est à nous, 25 octobre): l'essence gratuite?

Quoi qu'il en soit, nous sommes en présence d'une absurdité typiquement petite-bourgeoise: un capitalisme régulé par des monopoles publics échappant à la loi du profit, tout en laissant intact l’État capitaliste chargé d'assurer la fonctionnement de cette loi!

Dans la même veine, Lutte Ouvrière proclame que «Shell doit payer!». L’organisation trotskiste reproche au gouvernement de ne pas «se donner les moyens de faire payer les responsables de cette situation, à commencer par la Shell» (Lutte Ouvrière, 26 octobre ). Cela va bien évidement de pair avec sa vieille revendication d’une interdiction des licenciements par une loi «qui servirait de point d’appui pour les travailleurs qui se battent pour leur emploi» (Lutte Ouvrière, 27 juillet). Ah, si seulement le gouvernement écoutait L.O.-les-bons-conseils et faisait voter de bonnes lois, la lutte ouvrière serait tellement plus facile!

Fondamentalement, c’est toujours la même orientation: appeler l’État capitaliste à intervenir et à investir dans l’économie. Cette revendication de nationalisation est tellement révolutionnaire qu’elle est également défendue par Emmanuel Maurel (communiqué du 22 octobre), le chef de l’aile «gauche» du PS et allié de Benoît Hamon, ministre de Hollande.

Dès la fin du XIXe, le socialiste Paul Lafargue avait dénoncé le caractère anti-prolétarien des revendications de nationalisation en écrivant «En ce moment l’on est en train de fabriquer un communisme à l’usage des bourgeois: il est bien modeste; il se contente de la transformation de certaines industries en services publics ; il est surtout peu compromettant; au contraire, il ralliera nombre de bourgeois» (Le communisme et les services publics, 1882, brochure republiée par... Lutte Ouvrière, Ed. Les Bons Caractères).

Cette vieille idiotie opportuniste fait comme si l’État était au-dessus des classes et de la loi du profit. Les partisans de la nationalisation «oublient» que la nationalisation, comme de la privatisation, signifie restructuration donc licenciements, accroissement de l’exploitation, puisqu’elle ne supprime pas la loi de la valeur, base de fonctionnement du Capital.

La nationalisation «sous le contrôle des travailleurs» est tout aussi néfaste. Réclamer de l’État bourgeois qu’il assume lui-même la gestion capitaliste des entreprises en y associant les «représentants» des ouvriers est une revendication profondément bourgeoise.

Même nationalisées, les raffineries devront encore observer les lois du capitalisme. Sinon, elles feront faillite. Les entreprises capitalistes ne peuvent jamais être «sous contrôle ouvrier», c’est un paradoxe : le caractère capitaliste d’une entreprise ne tient pas à ce qu’elle est gérée par un patron cupide et un méchant encadrement, mais à ce qu’elle est un rouage d’une économie fondée sur le salariat et l’échange marchand. Il est bien plus absurde de s’imaginer qu’il est possible d’échapper aux lois du capitalisme dans le cadre d’une entreprise, qu’en fondant des communautés communistes isolées comme le rêvaient les socialistes utopiques du début du dix-neuvième siècle. Sauf à croire Cela revient à l’ignoble mensonge que le socialisme n’est qu’un capitalisme géré démocratiquement par les ouvriers (et «la population»).

Ce «contrôle ouvrier» (ou cette autogestion) conduirait les prolétaires à s’enchaîner eux-mêmes aux lois du capital et remplacerait l’exploitation par l’auto-exploitation des travailleurs parce qu’ils sont «propriétaires» de leur lieu de travail et de la production et parce qu’ils s’appliquent eux-mêmes les cadences, la flexibilité, les horaires, la production à fournir, les effectifs nécessaires, la gestion à tenir, les plans à élaborer, etc. Leur titre de propriété, loin de leur faire accéder à la classe supérieure, loin de les libérer de la condition prolétarienne de sans-réserves obligés de vendre leur force de travail pour vivre, les y enchaînerait au contraire beaucoup plus solidement..

Le socialisme est la négation du capitalisme d’Etat et de la «gestion» de l’entreprise par les salariés, idées chères à la bureaucratie CGT … et aux trotskistes.

 

Dans un style «alternatif», Solidaires Industrie (qui regroupe les syndicats SUD) se veut radical mais diffuse les mêmes illusions réformistes d’une bonne gestion des entreprises capitalistes: «Les fermetures d’usines, les suppressions d’emplois [...], plusieurs solutions existent pour les empêcher, dont une que nous porterons haut et fort dans les prochains mois : celle d’un droit de veto pour les comités d’entreprise sur les décisions dites stratégiques, et notamment les questions d’emplois. Fralib, Petroplus, Technicolor, PSA et toutes les autres entreprises concernées pourraient utiliser ce droit supplémentaire offert aux salarié-e-s via leurs représentants du personnel pour s’opposer à des projets provoquant des licenciements par centaines ou par milliers» (Le grain de sable, mai-juin 2012).

Alternative Libertaire reprend cette revendication à la une de son journal de septembre. Elle le présente comme une «option, plus radicale et en cohérence avec un projet autogestionnaire». Les CE sont une véritable école de gestionnaires et de bureaucrates, ainsi qu’un puissant moyen d’intégration des salariés à l’entreprise. Leur renforcement ne pourrait qu’enchaîner encore davantage les prolétaires en exaltant le corporatisme d’entreprise. AL est surtout radicale dans sa défense de la collaboration de classe!

 

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A Petroplus – comme à Fralib, Arcelor-Mittal, PSA et ailleurs – les syndicats tricolores et leurs larbins d’’ «extrême» gauche ont tout fait pour stériliser la nécessaire riposte prolétarienne. Les prolétaires doivent renouer avec les méthodes et les buts de la lutte classiste. Ils doivent rompre avec les impasses de la défense de l’entreprise et du service public, du respect de «l’intérêt général» et de l’économie nationale.

Ce qu’il faut, c’est la lutte prolétarienne ouverte, unifiant les travailleurs sur des objectifs de classe, une lutte combattant la division voulue par les patrons et leurs larbins. Il est évidemment d’abord nécessaire de riposter dans chaque entreprise menacée, mais il faut étendre la lutte au dehors par l’organisation de la solidarité de classe et dans la perspective d’un mouvement le plus large possible.

Ce n’est pas ce que font les organisations syndicales et les partis réformistes: ils s’efforcent d’empêcher la lutte par tous les moyens, ils sabotent la mobilisation dans les entreprises menacées, ils font reprendre le travail aux prolétaires en grève, ils isolent les plus combatifs – tout en organisant des initiatives spectaculaires qui ne sont rien d’autre que des soupapes de sûreté. Les prolétaires ne peuvent pas compter sur eux, mais seulement sur leur propre lutte, sur leur propre détermination, sur leur propre organisation.

 

Non aux licenciements ! Salaire intégral aux licenciés, en cas de réduction d’horaires, aux chômeurs !

Lutte de classe ouverte contre le patronat et son État ! Rupture avec les agents bourgeois implantés dans la classe ouvrière !

Non à la concurrence entre prolétaires ! Pour la lutte avec les moyens et les méthodes de classe !

 

 

Parti Communiste International

10 novembre 2012

www.pcint.org

 

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