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Prises de position - Prese di posizione - Toma de posición - Statements                        


 

Mexique : Sanglante répression bourgeoise et danse macabre de l’«extrême» gauche

 

La bourgeoisie mexicaine a une fois de plus montré son visage sanguinaire.

Dimanche 19 juin, la police fédérale, lourdement armée, a assassiné de sang froid une douzaine d’enseignants grévistes et de villageois qui les soutenaient à Nochixtlán. Ceux-ci bloquaient une autoroute dans le Sud du pays pour empêcher la police fédérale de se rendre à la capitale de l’Etat d’Oaxaca où les enseignants en grève ont organisé un campement.

Face à des manifestants qui n’avaient à disposition que des pierres et des bâtons pour se défendre, les flics ont utilisé gaz lacrymogène, balles en caoutchouc, hélicoptères et balles réelles. La police a empêché les ambulances d’accéder au site pendant les heures d’affrontement et a bloqué les manifestants qui tentaient d’emmener les blessés à l’hôpital.

Le massacre de Nochixtlán n'est pas une bavure ou un événement exceptionnel mais le symptôme du développement des luttes au Mexique et de la violence bourgeoise qui cherche à les endiguer.

 

Le Mexique secoué par la violence bourgeoise... et par les luttes ouvrières

 

Cet assassinat s’inscrit dans le climat de violence qui touche le Mexique depuis des années.

Ce pays de 120 millions d’habitants a connu un développement capitaliste qui en fait aujourd’hui la 2e puissance économique d’Amérique latine (derrière le Brésil), mais il est en proie depuis des années à des massacres. Les prolétaires et les paysans subissent une violente oppression et sont également victimes des affrontements entre forces bourgeoises (dont beaucoup sont liées aux trafiquants de drogue). La dernière décennie a été marquée par plus de 185 000 homicides volontaires au Mexique (et plus de 30 000 disparitions). Mais la situation intérieure ne se limite pas à la criminalité.

Le prolétariat mexicain relève la tête face aux exploiteurs. De multiples luttes récentes en témoignent.

 

Vague de grèves dans l’industrie et l’agriculture

 

En Basse-Califormie, dans la vallée de San Quintin, les journaliers agricoles mènent une longue grève de douze semaines contre leurs patrons qui leur imposent des salaires de misère et des journées de travail qui peuvent aller jusqu’à 18h. Ils font également travailler des enfants pour ramasser les récoltes de fruits et de tomates, avant tout destinés au marché étasunien. Les ouvriers agricoles sont au nombre de 80 000 dans la vallée et beaucoup sont des immigrés originaires des États du Sud, souvent d’origine indigène. Les travailleurs ont bloqué la route principale reliant la région à la Californie, laissant ainsi les cultures pourrir et causant des millions de dollars de pertes aux capitalistes de l’agrobusiness. Malgré la brutale répression policière, les travailleurs ont vu globalement leur situation s’améliorer. BerryMex, le plus grand producteur de la région, a du augmenter les salaires qui sont ainsi devenus les plus élevés de l’agriculture mexicaine. D’autres entreprises cotisent maintenant aux assurances sociales et offrent certains avantages à leurs salariés. Cependant, beaucoup de producteurs continuent à refuser d‘appliquer l’augmentation des salaires. La grève a aussi permis la création de deux syndicats agricoles indépendants des patrons et des syndicats charros (« vendus » à l’État et au PRI).

L’agitation ouvrière touche également les maquiladoras de Ciudad Juarez. Les luttes ont commencé chez Eaton Bussmann, fabricant de transformateurs électriques, avec pour objet l’augmentation des salaires et l’amélioration des conditions de travail (paiement de primes, installation de la climatisation dans les ateliers…) Ensuite, des travailleurs de l'usine Scientific Atlanta, une filiale de Foxconn, se sont mobilisés pour l’augmentation des salaires, des pauses déjeuner, la fin du harcèlement des contremaîtres, des congés payés, le droit de former un syndicat. Les travailleurs de Lexmark, fabricant d’imprimantes, ont, au même moment, commencé des manifestations pour exiger une augmentation des salaires et protester contre le harcèlement sexuel par les agents de la société. Les travailleurs de Ciudad Juarez ont subi une sévère répression patronale qui s’est traduite par des licenciements de grévistes.

Les 3 5000 mineurs d’ArcelorMittal, dans l’État du Michoacan se sont aussi lancés dans une grève d’une semaine en mars 2016. Les mineurs sont entrés en lutte contre des licenciements et la violation de leur convention collective.

Les 1 700 prolétaires de l’usine Nissan de la « ville industrielle de la vallée de Cuernavaca » (Civac) dans l’État de Morelos ont mené une grève de deux jours en avril et ont obtenu une augmentation de 4 % et 500 embauches à temps plein.

Les travailleurs du géant de la téléphonie Telmex ont grâce à la menace d’une grève obtenu une augmentation de salaire, même si la mobilisation a été sabotée par les syndicats jaunes.

Malgré la répression et les manœuvres des charros, force est de constater que le jeune prolétariat mexicain se bat avec courage dans une situation très difficile qui mêle précarité, absence de droits et répression brutale. C’est également le cas des travailleurs de l’éducation.

 

Une longue lutte contre la réforme de l’éducation

 

Depuis 2013, la Coordination des Travailleuses et des travailleurs de l'Éducation (CNTE) combat la mise en place d’une réforme de l’éducation qui, comme ailleurs, se traduit par une baisse des dépenses, une mise en concurrence entre les écoles (en mesurant la « performance » des unes et des autres) et une caporalisation des personnels enseignants avec un nouveau système d’évaluation (qui permettra de sanctionner les récalcitrants).

Cette réforme est une des traductions du « Plan pour le Mexique » que le président Peña Nieto a signé avec son parti (le Parti Révolutionnaire Institutionnel, membre de l’Internationale socialiste) et ses adversaires/partenaires du PRD (Parti de la Révolution Démocratique, également membre de l’Internationale socialiste) et le PAN (Parti d’Action Nationale, droite cléricale).

Depuis des mois, les enseignants, en rupture avec le syndicat jaune SNTE, ont engagé le combat contre le gouvernement fédéral mais aussi contre les gouvernements fédérés tenus par l’opposition. La lutte s’est principalement développée dans les États du Sud, régions les plus pauvres dans lesquels la population indigène domine.

Les grévistes ont attaqué les locaux des partis bourgeois à l’origine du « Plan pour le Mexique » mais aussi ceux des syndicats ouvertement jaunes et ultra-corrompus comme la CTM (affiliée à la Confédération Syndicale Internationale comme la CGT, la CFDT, FO…) et le SNTE (affilié à l’Internationale de l’Education comme les syndicats enseignants de la FSU, de la CFDT, de la CGT, de l’UNSA…). Ils ont bloqué l’activité économique (raffinerie, dépôts de carburants, aéroports, routes, centrale hydroélectrique…) et occupé des lieux symboliques, comme la place centrale de Mexico, le Zocalo.

La répression a été très féroce avant même ce 19 juin. Les manifestants ont du affronter des hordes de flics. Des milliers d’enseignants ont été licenciés pour avoir refusé de passer les tests d’’évaluation’ ou pour avoir fait grève. Des centaines de syndicalistes sont en prison. C’est par exemple le cas de deux dirigeants de la CNTE arrêtés le 12 juin à Mexico à la sortie d'une réunion de la CNTE par six hommes cagoulés lourdement armés. Ils ont été transférés immédiatement à la prison de haute sécurité de Hermosillo.

 

LES RECETTES DE L’« EXTREME » GAUCHE CONTRE LA LUTTE PROLETARIENNE

 

Face à cette grève, on a pu voir toutes les composantes de l’« extrême » gauche mexicaine prendre des positions plus anti-prolétariennes les unes que les autres. Ces « révolutionnaires » s’agitent en tous sens pour ne pas affronter la bourgeoisie et pour détourner les prolétaires de la reprise de la lutte ouverte.

 

Recette n°1 : le front unique avec la bourgeoisie

 

Dans ce climat d’agitation, un nouveau parti bourgeois tente de surfer sur le mécontentement. C’est le Mouvement de Régénération Nationale (Morena) de Andrés Manuel López Obrador (AMLO), ancien dirigeant du PRD et ancien chef du District fédéral de Mexico.

Les dirigeants de la CNTE, même s’ils mènent une lutte héroïque, restent des partisans de la collaboration des classes. Ils espèrent avant tout l’élection d’AMLO qui joue aujourd’hui la petite musique nationaliste et populiste dans le style Chavez. Le CNTE a organisé en commun avec Morena une grande manifestation de protestation à Mexico contre la répression. Cela a donné l’occasion à AMLO d’avancer ses revendication dont la démission du ministre de l’éducation, le châtiment des coupables mais aussi la formation d’un « gouvernement de transition » avec le président actuel.

Bien entendu, des trotskistes ont sauté sur l’occasion pour se faire les porteurs d’eau de ce démagogue populiste. C’est en particulier le cas de la Izquierda socialista (membre de la Tendance Marxiste Internationale) qui se prononce pour la constitution d’un« front national de lutte des travailleurs des campagnes et des villes » qui regrouperait les « organisations populaires, sociales, syndicales, étudiantes, de paysans et les organisations que comme Morena ont choisi la voie électorale »(« Represión en Oaxaca, ¡debe caer la contrarreforma educativa y este gobierno de asesinos! », www.laizquierdasocialista.org, 19 juin 2016). Ce « front » a comme objectif déclaré de porter AMLO au pouvoir car, selon l'IS, il sera « impossible de gagner l’élection présidentielle sans un mouvement de masse dans la rue » (« Movilización masiva en defensa de la CNTE, hace falta aterrizarla en la acción unitaria, balance de la marcha », 27 juin 2016)

D’autres trotskistes n’ont pas encore fait allégeance à Morena, mais défendent une même ligne nationaliste et populiste. C’est en particulier le cas de ce qui reste des deux grands courants trotskistes à l’échelle internationale : la IVe Internationale et les Lambertistes.

Ces trotskistes se sont comportés durant des décennies comme une aile gauche des partis bourgeois, pendant longtemps comme membres du PRD. Aujourd’hui, ils tentent de reprendre leur indépendance organisationnelle en créant une Organisation Politique du Peuple et des Travailleurs (OPT), impulsée par des militants du syndicat des électriciens SME. Le Parti Révolutionnaire des Travailleurs (PRT), affilié à la Quatrième internationale, l’Organisation Socialiste des Travailleurs (OST) lambertiste et d’autres groupes trotskistes, mais aussi des « activistes du mouvement des usagers de l’énergie électrique, de militants de la CUT et de personnes provenant de l’expérience d’auto-organisation communautaire des peuples de Guerrero » participent à l’OPT. (« Au Mexique, avec ou sans reconnaissance légale, l’OPT est en marche », europe-solidaire.org, 21 février 2014).

L’OPT revendique « une réouverture du dialogue ». C’est digne des pires collaborationnistes qui pleurent lorsque l’on les prive du sacro-saint « dialogue social » !

Même si elle revendique une « socialisation des moyens de production », l’OPT a un programme intégralement bourgeois : défense de la souveraineté nationale, développement de l’économie nationale et une démocratie « participative et populaire ». Le mot d’ordre qui trône au fronton de son site internet est symptomatique : « Pour la libération nationale et l’émancipation sociale ». Le tout accompagné d’un drapeau mexicain ! (opt.org.mx).

Le PRT, l’IS ou l’OST sont donc totalement étrangers au combat prolétarien, ils ne sont qu’une composante du nationalisme bourgeois.

A côté d’eux, d’autres courants se veulent plus orthodoxes mais défendent des positions tout autant anticommunistes. C’est en particulier le cas des héritiers du Parti communiste du Mexique.

 

Recette n°2 : le « pouvoir populaire »

 

Le Parti Communiste du Mexique PCM, qui participe à la « Rencontre internationale des partis communistes et ouvriers » avec ce qui reste des PC pro-soviétiques en particulier le PC grec (KKE), prend des postures révolutionnaires en dénonçant pêle-mêle le PRI, le PRD, le PAN et Morena décrit comme « une nouvelle social-démocratie », et en affirmant que le capitalisme « ne se réforme pas ». Il avance également qu’il faut mettre « fin au gouvernement de Peña Nieto, mais pas en faveur d'un gouvernement anti-néolibéral vantant les partisans de la gestion keynésienne du capitalisme » et prétend refuser les « alliances inter-classistes » (« El PCM con los trabajadores de la educación », elcomunista.nuevaradio.org, 23 Junio 2016)

Ces annonces sont juste pour la galerie : le PCM est fidèle à la vieille ligne petite-bourgeoise de « lutte contre les monopoles ». La présidence de Peña Nieto est dénoncée comme un « pouvoir des monopoles » contre lequel il faut construire un « front anti-monopoliste, anti-capitaliste et anti-impérialiste » (« El Estado mexicano: violencia organizada para garantizar la ganancia y el poder de los monopolios », 31 mai 2016). Ce front est bien entendu une alliance interclassiste car « Le PCM est convaincu qu'une telle tâche peut être pris en charge par la classe ouvrière, par tous les employés, les travailleurs au chômage, les travailleurs de l'émigration, en forgeant une alliance avec les secteurs populaires, en faveur du pouvoir des travailleurs et une économie populaire » (« El PCM con los trabajadores de la educación », 23 juin 2016).

Un autre PC du Mexique, le PCdeM, défenseur de Cuba, promeut une même ligne interclassiste. Son programme met en avant la dictature du prolétariat mais tout cela se limite aux documents de congrès. Non seulement, il ne défend pas une orientation de classe dans la lutte actuelle en mêlant « défense des droits des travailleurs » et « défense de l’enseignement public » (« Pronunciamiento del PCdeM sobre la represión en contra del magisterio », partidocomunistademexico.wordpress.com, 23 juin 2016), mais, de plus, son objectif est « de construire une Assemblée nationale du pouvoir populaire » (« En lugar de votar, construir poder popular », 30-30, avril-mai 2015, ). Ce « pouvoir populaire » est inspiré de l’héritage d’un chef paysan – et nullement marxiste – de la Révolution mexicaine : « La pensée et l'exemple de Emiliano Zapata nous donnent de nombreuses clefs qui aujourd’hui sont fondamentales pour parvenir à l'unité de tous les exploités, (...) et former un seul et grand front classiste [ sic!] contre les capitalistes, où chaque secteur des exploités, les femmes, les hommes, les jeunes, les métis, les autochtones, les ouvriers, les paysans, etc., ont une place dans la lutte » (« Emiliano Zapata, su legado y su ejemplo a 97 años de su asesinato », 10 avril 2016).

Enfin, les maoïstes de l’Organisation Communiste Révolutionnaire défendent la même perspective. Ils avancent une vision populiste dans laquelle le prolétariat disparaît : « l'exploitation et l'oppression de la grande majorité des gens par une petite classe de grands capitalistes, dominé par le système capitaliste-impérialiste dans le monde »» (« De Ayotzinapa a los “Porkys”: crímenes de un Estado perverso al servicio de un sistema opresivo ¡Luchemos contra el poder y preparemos la revolución! », aurora-roja.blogspot.fr). Pour lutter contre cela, leur réponse est une « nouvelle synthèse du communisme développé par Bob Avakian », le caudillo du Parti Communiste Révolutionnaire des Etats-Unis. Cette synthèse n’est qu’un réchauffé d’un vieux plat indigeste : la « République populaire » et le « front uni » ouvrier / paysans / classes moyennes / moyenne bourgeoisie (La Revolución Liberadora. Orientación estratégica y programa básico).

Dans des formes différentes, ces rejetons du stalinisme ne rêvent que d’un capitalisme « populaire », c’est-à-dire d’un régime bourgeois qui concéderait quelques miettes aux prolétaires.

 

Recette n°3 : l’assemblée constituante

 

D’autres organisations reprennent un grand classique du réformisme : l’assemblée constituante.

C’est en particulier le cas de deux groupes que tout semble opposer : le PCM (marxiste-léniniste) issu du courant pro-albanais et membre de la Conférence internationale des Partis et organisations marxistes-léninistes, et le Mouvement des Travailleurs pour le Socialisme, membre de la Fraction trotskyste - Quatrième Internationale dont une des principales composantes est le PTS argentin.

Le PCM(ml) et le MTS défendent une « grève générale politique » qui déboucherait sur un « gouvernement provisoire » basé sur une assemblée constituante « populaire et démocratique » pour les « ml » (« De la Asamblea Nacional Popular a la Nueva Constituyente », Vanguardia Proletaria, 15-31 janvier 2015) ou « libre et souveraine » (une de Tribuna Socialista, 14 novembre 2014).

L’assemblée constituante ne peut servir qu’à canaliser les luttes ouvrières vers une solution parlementaire bourgeoise et contre-révolutionnaire. Comme le disait Lénine dans son rapport au IIIe Congrès de l’IC : « La Constituante est pour eux un gros mot. Non seulement pour les communistes conscients, mais aussi pour les paysans. La vie leur a appris qu'Assemblée constituante et gardes blancs, c'est la même chose; que la première entraîne inévitablement les seconds » (Rapport sur la tactique du Parti Communiste de Russie, 5 juillet 1921).

Ce mot d’ordre démocratique doit être combattu fermement car c’est une impasse pour détourner de la lutte révolutionnaire pour abattre l’Etat bourgeois. C’est ce qu’ont fait les bolcheviks en 1917 et cela leur a permis de renverser le pouvoir des classes dominantes : sans renversement violent de son pouvoir il est impossible que la bourgeoisie laisse tranquillement se constituer un autre pouvoir : elle répond déjà par la violence brutale aux grèves, elle le fera à plus forte raison quand il s’agit du pouvoir !

 

Recette n°4 : le « gouvernement ouvrier et paysan »

 

Enfin, les frères ennemis du Groupe spartaciste du Mexique (GEM) et du Groupe Internationaliste (GI) rejettent l’assemblée constituante pour lui opposer le « gouvernement ouvrier et paysan.

Dans l’Internationale Communiste comme dans la Quatrième Internationale, le « gouvernement ouvrier » ou « ouvrier et paysan » est tout autre chose que le pouvoir révolutionnaire prolétarien, autrement dit la dictature du prolétariat.

Il suffit de citer le Programme de Transition de Trotsky dont les Spartacistes se veulent les gardiens du Temple :

« De tous les partis et organisations qui s'appuient sur les ouvriers et les paysans et parlent en leur nom, nous exigeons qu'ils rompent politiquement avec la bourgeoisie et entrent dans la voie de la lutte pour le gouvernement ouvrier et paysan. Dans cette voie, nous leur promettons un soutien complet contre la réaction capitaliste. En même temps, nous déployons une agitation inlassable autour des revendications transitoires qui devraient, à notre avis, constituer le programme du "gouvernement ouvrier et paysan".

La création d'un tel gouvernement par les organisations ouvrières traditionnelles est-elle possible ? L'expérience antérieure nous montre, comme nous l'avons déjà dit, que c'est pour le moins peu vraisemblable. Il est, cependant, impossible de nier catégoriquement par avance la possibilité théorique de ce que, sous l'influence d'une combinaison tout à fait exceptionnelle de circonstances (guerre, défaite, krach financier, offensive révolutionnaire des masses, etc.), des partis petit-bourgeois, y compris les staliniens, puissent aller plus loin qu'ils ne le veulent eux-mêmes dans la voie de la rupture avec la bourgeoisie. En tout cas, une chose est hors de doute : si même cette variante, peu vraisemblable, se réalisait un jour quelque part, et qu'un "gouvernement ouvrier et paysan", dans le sens indiqué plus haut, s'établissait en fait, il ne représenterait qu'un court épisode dans la voie de la véritable dictature du prolétariat ».

Ce gouvernement est le gouvernement du « front unique » c’est-à-dire d’une coalition entre communistes et des partis bourgeois que l’on supplie de « rompre avec la bourgeoisie » pour mettre en œuvre une étatisation de l’économie, l’ouverture des livres de compte ou le crédit populaire. Cette perspective que Trotsky avançait avec beaucoup de réserves mais que ses disciples répètent à tout moment, est au mieux illusoire, au pire totalement suicidaire !

L’histoire a démontré que c’est un mot d’ordre de confusion qui renforce la croyance des prolétaires dans la possibilité de s’appuyer sur les organisations collaborationnistes pour lutter contre le capitalisme. Mais ce n’est là qu’une mortelle illusion ! Jamais les tenants de la collaboration des classes ne lutteront contre le capitalisme : ils se sont toujours opposés et ils s’opposeront toujours aux attaques contre le système bourgeois. Dans les faits ce mot d’ordre ne sert qu’à éviter que les éléments d’avant-garde qui se dégagent dans les luttes prolétariennes rompent avec la domination du réformisme contre-révolutionnaire.

 

Au Mexique comme ailleurs, UNE seule ISSUE : la révolution prolétarienne contre toutes les impasses réformistes

 

Tous les bonimenteurs de l’ « extrême » gauche tentent de fourguer aux prolétaires leur camelote frelatée : libération nationale, assemblée constituante, pouvoir populaire, gouvernement ouvrier…

Revendiquer, pour lutter contre la terreur bourgeoise, la démocratisation du pouvoir et les mensonges réformistes, c'est s'enfermer soi-même dans la camisole de force que la bourgeoisie veut imposer pour exorciser les luttes ouvrières. Lancer de tels appels au prolétariat, c'est lui demander de se suicider pour ne pas être assassiné, c'est se comporter comme son pire ennemi.

Le cycle des luttes d'émancipation nationale s'est achevé partout dans le monde, et la jeune classe ouvrière doit viser directement la révolution uniquement prolétarienne. Ce qui ne peut se faire que contre la bourgeoisie démocratique et ses soutiens. Le prolétariat a sans doute aussi la tâche historique de pousser jusqu'au bout, spécialement dans l'agriculture, les tâches « démocratiques bourgeoises », c’est-à-dire la liquidation des vieux restes d’oppression pré-capitalistes que la bourgeoisie n’a pas réussi à réaliser. Mais cette seconde tâche doit être assumée sans jamais atténuer ou renoncer au premier objectif, car elle transitoire et subordonnée à la révolution prolétarienne, pour laquelle les prolétaires des villes n’auront pas d’autres alliés sûrs que les ouvriers agricoles. Les petits paysans propriétaires ne seront jamais au mieux, comme tous les petit-bourgeois, que des compagnons de route incertains, toujours prêts à se tourner vers la bourgeoisie.

Les communistes appellent donc les ouvriers du Mexique comme de tous les pays à rejeter les dangereuses illusions réformistes et à éviter la grave erreur de considérer ceux qui les répandent comme des alliés possibles

Les révolutionnaires disent aux prolétaires qu'ils doivent accepter la lutte sur le terrain où les défie la bourgeoisie, et préparer la riposte qui exigera des forces ouvrières d'autodéfense capables de répondre à la violence par la violence et aux armes par les armes. Une telle riposte ne peut avoir de sens que si elle est indissolublement reliée à la perspective de l'offensive révolutionnaire, à plus ou moins long terme, contre la bourgeoisie et son Etat, pour instaurer le pouvoir dictatorial des prolétaires. Ils appellent les plus conscients et les plus combatifs à participer au dur travail de constitution d'un parti authentiquement révolutionnaire et marxiste, internationaliste et international, seul capable de réaliser cette préparation et diriger ce combat, parti qui fait si cruellement défaut au prolétariat depuis des décennies.

Il n'y a pas, il ne peut pas y avoir, d'autre voie !

 

 

Parti Communiste International

10 juillet 2016

www.pcint.org

 

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