De la crise de la société bourgeoise à la révolution communiste mondiale

( Manifeste du Parti Communiste International. 1981 )

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Sommaire

 

●    INTRODUCTION

●    PREMIERE PARTIE : Retour au communisme révolutionnaire de Marx et de Lénine

            I. Le capitalisme appelle la révolution communiste

            II. La classe ouvrière possède dans son passé les armes pour vaincre

    DEUXIEME PARTIE : Objectifs, voies et moyens de la révolution communiste mondiale

            I. Position du parti devant les grandes tendances politiques de l’impérialisme

            II. Les tâches de la révolution communiste mondiale

            III. Orientations internationales d’action du parti

    CONCLUSION

●    ANNEXES

                1. Les principes du communisme révolutionnaire

                2. Bibliographie du mouvement communiste

 

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DEUXIEME PARTIE : Objectifs, voies et moyens de la révolution communiste mondiale

 

III. Orientations internationales d’action du parti

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1. Les tâches du parti communiste

 

Le conflit existant entre les forces productives modernes et les rapports de production capitalistes se traduit par la lutte entre la bourgeoisie et le prolétariat.

Les divers contingents de la classe ouvrière se révoltent contre les dures conditions qui leur sont faites et se heurtent aux limites de leur propre esclavage dans une série de batailles partielles. Dans ce cours tourmenté, avec ses reculs dramatiques et ses brusques avancées, la classe ouvrière rassemble ses forces en une seule armée prolétarienne pour mener les batailles décisives contre les forteresses étatiques du capital.

L’activité du parti ne peut ni ne doit se limiter à maintenir la pureté des principes théoriques et de l’organisation. Elle ne vise pas non plus à obtenir à tout prix des succès immédiats ou une plus grande popularité. Toujours et en toute situation, elle doit tendre à se développer simultanément dans trois directions :

 

a) défendre et préciser en fonction des faits nouveaux qui se produisent les postulats fondamentaux du marxisme révolutionnaire, c’est-à-dire la conscience théorique du mouvement de la classe ouvrière, qui est la boussole du parti de classe ;

b) assurer la continuité de l’organisation du parti et de son efficacité, et la protéger contre toutes les influences extérieures contraires à l’intérêt révolutionnaire du prolétariat ;

c) participer activement à toutes les luttes de la classe ouvrière, même celles qui sont suscitées par des intérêts partiels et limitées, pour développer la conscience et l’organisation de classe des ouvriers, et pour lier ces luttes aux buts finaux révolutionnaires, en aidant les prolétaires d’avant-garde à faire de cette guérilla quotidienne un levier de la lutte générale révolutionnaire contre le capitalisme.

 

Le but suprême de cette activité complexe du parti est de réaliser les conditions subjectives de la préparation révolutionnaire. Il s’agit de mettre le prolétariat et le parti lui-même en mesure de profiter des possibilités révolutionnaires objectives que pourra donner l’histoire dès qu’elles apparaîtront, de manière à vaincre au lieu d’être vaincus.

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2. La défense des conditions de vie et de travail de la classe ouvrière

 

Les communistes sont les défenseurs les plus résolus des revendications qui expriment les exigences réelles et urgentes de la vie des larges masses, qu’elles soient ou non compatibles avec la marche du capitalisme, alors que cette « compatibilité » est au contraire le premier souci des tenants de la politique réformiste et collaborationniste.

Les communistes combattent la politique de sabotage contre-révolutionnaire des bureaucraties réformistes. Celles-ci s’appuient sur les intérêts passagers et corporatifs de couches aristocratiques, qui aspirent à faire l’économie de la lutte et à maintenir leur situation de privilèges, pour prôner et solidifier l’alliance avec le patron et avec l’État capitaliste contre la masse des travailleurs des entreprises concurrentes, des catégories inférieures ou des travailleurs étrangers, particulièrement ceux des pays dominés par leur propre impérialisme.

En agitant la défense énergique des catégories les plus basses et en combattant les réactions aristocratiques et « protectionnistes », les communistes n’opposent nullement les intérêts d’une couche d’ouvriers à d’autres : ils luttent pour les revendications communes à toute la classe et donc celles qui sont susceptibles d’unifier ses rangs, par-delà les résultats immédiats de la lutte.

C’est ainsi qu’ils participent aux luttes économiques et syndicales en avançant les grandes orientations suivantes :

 

– la défense du salaire de base, la lutte pour l’intégration des primes au salaire, la lutte contre le salaire aux pièces et au rendement, les heures supplémentaires ;

– la lutte pour la réduction immédiate de la durée du travail, contre les cadences infernales, pour la limitation du travail de nuit et du travail posté au minimum indispensable pour des raisons techniques ;

– la lutte contre les licenciements ;

– la revendication du plein salaire aux licenciés, aux retraités, des ressources au moins égales au salaire minimum pour tous les sans-travail et les travailleurs sous l’uniforme ;

– la lutte pour la gratuité des soins et des transports, pour la réduction massive des loyers et des tarifs publics, pour la suppression des impôts frappant le salaire ou la consommation des ouvriers.

 

Ils combattent en même temps toutes les « mises en carte » de la classe ouvrière ou d’une de ses parties (livret de travail en Russie, « pass » en Afrique du Sud, cartes de séjour et de travail dans les pays d’immigration) et toutes les mesures instaurant dans l’État ou dans le travail l’infériorité d’une catégorie de travailleurs par rapport aux autres (les femmes, les jeunes, les hors statut, les travailleurs immigrés, etc.).

Ils luttent pour que la classe ouvrière prenne en charge la défense collective des vieux travailleurs, des jeunes encasernés et en butte au despotisme de la hiérarchie militaire, pour qu’elle n’abandonne pas à leur isolement les luttes des prolétaires des petites entreprises artisanales et des campagnes, particulièrement défavorisés par la dispersion.

Ils se fixent pour tâche d’aider à l’organisation des chômeurs en liaison étroite avec les travailleurs actifs qui sont eux-mêmes, en période de crise, des chômeurs en sursis, et à l’organisation aux côtés des travailleurs actifs des masses des prolétaires sans travail marginalisés des ghettos ou des bidonvilles des grandes cités, qui se heurtent à de terribles problèmes non seulement de ressources, mais encore de logement, d’eau potable, etc.

Ils attachent une attention particulière à l’organisation des catégories les plus exploitées de la classe ouvrière, comme les femmes prolétaires ou la jeunesse, en combattant toute idée d’autonomie des luttes de la femme en général ou de la jeunesse en général, mais en liant le plus possible ces luttes à celle de l’ensemble de la classe ouvrière.

La classe ouvrière a intérêt à lutter de la façon la plus résolue non seulement pour l’égalité juridique de la femme prolétaire, le droit complet au divorce, la contraception et l’avortement libres et gratuits, mais également contre toute discrimination économique ou de statut dans le travail, pour la généralisation des crèches et des garderies et leur gratuité, la protection de la maternité, etc.

La jeunesse prolétarienne est l’avenir de la classe ouvrière et la « flamme de la révolution » (Liebknecht). La lutte contre l’exploitation de la jeunesse ouvrière et des apprentis et pour son organisation, contre l’abrutissement organisé dans l’école bourgeoise, contre le militarisme bourgeois, ainsi que son éducation révolutionnaire par la participation aux luttes de l’ensemble de la classe ouvrière, sont autant de tâches indispensables à la défense de la classe et à la préparation de la révolution communiste.

Les communistes combattent les illusions cultivées par les laquais réformistes de la bourgeoisie selon lesquelles la classe ouvrière pourrait améliorer son sort par une meilleure formation professionnelle ou en veillant aux intérêts de l’économie nationale, de l’entreprise, du service public.

Ces sornettes sont autant de moyens d’endormir les travailleurs, de diviser leurs rangs et de stériliser leur lutte de défense collective.

Avant même de pouvoir éliminer les causes de son esclavage par la transformation communiste de la société, la classe ouvrière ne peut lutter efficacement contre les effets de cet esclavage qu’en faisant usage de sa force de classe. Cette force lui vient de son nombre, de sa concentration, des formidables moyens de pression que lui donne le capital de par sa place dans le processus de production, de son aptitude à la discipline et à l’organisation, de sa détermination à défendre ses intérêts en affrontant la violence de la classe capitaliste.

Elle ne doit donc pas chercher ses armes de lutte dans l’arsenal des procédures de négociation, d’arbitrage, de conciliation et de participation, chères aux partisans de la collaboration des classes et de la paix sociale, mais dans les formes de la lutte directe et ouverte, comme la grève sans préavis et sans limitation préalable de durée, la solidarité active contre l’adversaire, les piquets de grève et toutes les formes d’autodéfense et de riposte prolétarienne à la violence et au terrorisme des capitalistes et de leurs sbires.

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3. La lutte pour l’organisation systématique de la classe ouvrière

 

Il ne s’agit pas ici de traiter la question de la constitution des organes de lutte politique révolutionnaire, comme les Conseils ouvriers lors de la dernière vague prolétarienne. De telles organisations ne peuvent naître que dans une situation d’extrême tension révolutionnaire et les communistes mettent des conditions précises aux initiatives à prendre pour leur constitution ou leur renforcement, afin qu’ils assurent leur fonction effective et ne soient pas détournés de leur rôle révolutionnaire.

En attendant qu’une telle situation se présente, les communistes considèrent qu’une augmentation décisive de l’influence du parti dans les masses, et à plus forte raison l’entrée dans une phase révolutionnaire, ne peuvent se dessiner sans que se développe entre le parti et la classe une gamme d’organismes nés pour la défense des intérêts immédiats, qui regroupent de nombreux prolétaires et au sein desquels existe un réseau permanent du parti.

La question se pose donc de savoir quelle est l’attitude des communistes vis-à-vis des grandes organisations syndicales actuelles. Du fait de la pression toujours plus grande que l’État capitaliste a exercé sur la classe ouvrière sans qu’elle ait été en mesure de lui opposer une contre-pression adéquate au moyen de l’activité d’un parti prolétarien fort, la tendance à l’intégration des syndicats à l’État capitaliste s’est partout considérablement renforcée pendant ces cinquante dernières années.

Les grandes organisations officielles sont aujourd’hui soit des syndicats officiels d’État, comme dans les pays de l’Est, dans de nombreux États d’Amérique latine et, à la suite de la victoire de la vague anti-impérialiste, dans la plupart des pays d’Asie ou d’Afrique ; ou alors des syndicats démocratiques, formellement indépendants, mais dont toute la bureaucratie contre-révolutionnaire est en réalité un pilier de l’État impérialiste, comme dans les démocraties libérales occidentales, au Japon et dans certains pays latino-américains.

L’objectif ne saurait être de reconquérir tels quels les syndicats démocratiques, que la contre-révolution est parvenue à vider de toute vie de classe en adaptant toujours davantage leur fonctionnement aux seules exigences de la collaboration avec la bourgeoisie à tous les niveaux de l’entreprise et de l’administration de l’État capitaliste. Si donc, dans les rudes batailles de classe à venir, des secteurs ou des pans de leur organisation devaient passer à la lutte prolétarienne, ce ne pourrait être que dans une lutte contre les appareils, les bureaucraties et les hiérarchies centrales officielles, qu’aucune réforme de statuts ne saurait amener à défendre les intérêts indépendants de classe du prolétariat.

A plus forte raison, l’objectif des communistes révolutionnaires ne peut être d’obtenir dans les pays de l’Est ou du Tiers Monde des syndicats démocratiques à l’occidentale. La social-démocratie, l’Église et les courants démocratiques petits-bourgeois sur lesquels s’appuie cette tendance, qui se manifeste aujourd’hui au Brésil et en Pologne après l’expérience espagnole réussie par la bourgeoisie, sont autant de laquais qui aident la classe dominante à réaliser l’ouverture démocratique des structures officielles.

La période historique entamée remet à l’ordre du jour, avant même la possibilité d’une issue révolutionnaire, la reconstitution d’un réseau d’organisations ouvrières indépendantes de l’État et des petits bourgeois, c’est-à-dire l’organisation systématique de la classe.

La voie de la renaissance de ce tissu d’associationnisme ouvrier part nécessairement de tentatives plus ou moins couronnées de succès pour faire vivre des organismes aux objectifs encore nécessairement limités et à la vie bien souvent éphémère pour passer ensuite, de façon extrêmement inégale suivant les secteurs et les pays, à des efforts de coordination et d’organisation plus systématiques des luttes à une échelle plus vaste. Les communistes participent naturellement à cet effort en œuvrant à la constitution d’un front prolétarien de lutte à partir des revendications les plus pressantes de la classe : ils luttent pour faire tomber toutes les barrières artificielles, de caractère programmatique, religieux ou philosophique à l’organisation des travailleurs sur la base de la défense de leurs intérêts de classe, et attachent une attention particulière aux tentatives des travailleurs combatifs d’établir des liaisons pour préparer les luttes à venir hors de l’emprise des appareils officiels.

Ce n’est qu’à un moment plus avancé de la lutte, déterminé par la révolte massive des travailleurs contre les directives des bureaucraties vendues des syndicats actuels, que pourra se poser la question de la reconstitution de grands organismes groupant l’ensemble des travailleurs des diverses branches industrielles d’un même pays. Cette reconstitution pourra prendre elle-même les formes les plus diverses allant, suivant les conditions particulières, de la transformation radicale de certaines parties des structures actuelles à leur désertion par les travailleurs, de la dissolution des organismes actuels à leur maintien à côté des nouveaux organismes de classe. Elle pourra également assumer des combinaisons de tâches extrêmement variées suivant le degré de maturation révolutionnaire de la situation où les conditions permettront à telle ou telle forme de se développer et de se généraliser, suivant la conjoncture particulière à tel ou tel pays, les traditions historiques, le jeu réciproque des courants politiques, la gamme des organisations existantes, les rapports de force, etc.

En attendant, les communistes révolutionnaires ne désertent pas les organisations existantes pour y laisser les travailleurs à l’influence exclusive des courants réformistes ou carrément conservateurs. Ils travaillent aussi en leur sein, non pour en conquérir les appareils, mais pour y démontrer la finalité contre-révolutionnaire des bureaucraties vendues et arracher les travailleurs à leur influence à partir des poussées élémentaires de lutte. Une telle activité exige des formes plus ou moins poussées de clandestinité suivant les cas et exclut la prise de responsabilité, même locale et périphérique, dans les organismes déjà statutairement liés à l’État et à adhésion obligatoire.

Les communistes agitent constamment l’idée que la seule lutte de défense revendicative ne saurait suffire à délivrer la classe ouvrière de son esclavage. Cette lutte serait à la longue inefficace et même stérile, si elle ne servait de terrain pour éduquer le prolétariat à la nécessité de la transformation communiste de la société et de terrain d’entraînement des forces de classe pour la conquête révolutionnaire du pouvoir, qui seule pourra consolider et garantir les victoires obtenues sur le terrain revendicatif, bref si cette lutte n’était conçue comme « une école de guerre du communisme » (Engels).

Ils combattent par conséquent toute idée de neutralité politique des organisations immédiates comme une concession dangereuse à la bourgeoisie. L’expérience enseigne que c’est sous ce drapeau que se sont souvent présentées les forces qui ont livré ces organisations à la politique de conservation bourgeoise et à l’État capitaliste.

Bien qu’ils soient par ailleurs convaincus que la victoire révolutionnaire est impossible sans que le parti ait conquis une influence déterminante dans les organisations nées de la lutte revendicative, les communistes ne font cependant pas de la direction des organisations immédiates un préalable à la révolution ; ils luttent pour démontrer dans le vif de la lutte que le besoin de l’orientation communiste et de la liaison la plus étroite avec le parti révolutionnaire ne découle pas d’un a priori programmatique, mais de la nécessité de donner aux organisations immédiates de la classe leur pleine efficacité dans la lutte qu’elles sont en train de mener contre la classe capitaliste.

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4. L’attitude du prolétariat à l’égard des couches moyennes et de la paysannerie

 

Le capitalisme, c’est la concentration. Aussi remplace-t-il la petite production par la grande. Mais il le fait en projetant constamment dans la ruine et la misère la grande masse des petits producteurs, boutiquiers, artisans et paysans qu’il transforme en prolétaires.

Cependant, toutes ces couches qui sont des restes de modes de production dépassés n’ont pas une attitude unique et oscillent avec les rapports de forces entre la bourgeoisie et le prolétariat. Les réactions de la petite bourgeoisie marchande des villes à la misère s’accompagnent, davantage encore que dans la paysannerie, d’attitudes particulièrement réactionnaire dues à leur mode de production spécialement borné, et de possibilités de mobilisation contre-révolutionnaire que le prolétariat doit combattre non seulement par une attitude politique sans concessions, mais également en avançant à l’égard de ces couches des revendications qui visent à soulager effectivement leur misère provoquée par les crises et les guerres, et donc à les neutraliser.

Pour ce qui est de la paysannerie, le prolétariat des villes et des campagnes ne doit pas seulement soutenir dans les pays du Tiers Monde la lutte contre les résidus des vieilles formes d’exploitation. Il doit aussi un appui total à la lutte des paysans exploités contre la propriété foncière capitaliste, dont il vise la suppression.

Les communistes combattent l’idée que les masses paysannes pauvres pourraient améliorer leur sort en luttant pour l’augmentation du prix des produits agricoles ou le protectionnisme, et en s’alliant dans ce but avec le propriétaire foncier ou le capitaliste agraire ; ces mesures profitent avant tout à ces derniers et les renforcent au détriment des masses paysannes pauvres. Tout en combattant les illusions réactionnaires de ces couches, les communistes soutiennent l’organisation des paysans pauvres et sans terre sur le terrain de la lutte contre l’exploitation du propriétaire foncier, pour la suppression du métayage, pour la baisse des fermages et le renouvellement automatique des baux, contre les expropriations. Ils épaulent également leur lutte contre l’exploitation éhontée des trusts agro-alimentaires, même lorsqu’elle se pare de la forme coopérative, en liaison avec les prolétaires de ces industries.

Parallèlement à l’élimination des vieilles classes liées à la petite production, le capitalisme développe des catégories et des couches salariées non-productives, particulièrement nombreuses dans les pays impérialistes, où sont situés les centres vitaux du capitalisme mondial et de sa gestion, et où les phénomènes de parasitisme et de putréfaction sont poussés au paroxysme.

Ces couches intermédiaires sont loin d’être uniformes. Les plus basses, en particulier la population féminine employée dans les bureaux ou les grands magasins, plongent dans le prolétariat dont elles partagent déjà entièrement la vie et aussi de plus en plus les conditions de travail à la suite de la mécanisation et de l’automatisation des tâches. De l’autre côté, les couches les plus élevées, celles qui servent de garde-chiourmes à l’exploitation capitaliste et celles qui possèdent une parcelle de savoir et de culture, sont attirées par la bourgeoisie dont elles singent les mœurs.

Entre les deux, se situe une sorte de marais social dont les membres sont attirés par l’exemple bourgeois, mais que la situation intolérable dans laquelle les précipitent les crises projette vers le pur prolétariat, qu’ils côtoient déjà dans l’entreprise comme à l’école, à la caserne ou dans les cités.

Situées au milieu de la société, c’est-à-dire entre les classes fondamentales dont elles redoutent l’affrontement, ces couches se font les champions des revendications interclassistes et donc démocratiques par excellence ; en vertu de cette position intermédiaire, elles réclament la direction des luttes pour ces revendications en prônant les méthodes dérisoires d’appel à la conscience libérale de la bourgeoisie. Fournissant la majeure partie des contingents étudiants, elles véhiculent toutes les illusions sur la culture et la formation professionnelle. Poussées à la défense du salaire et des conditions de travail, menacées par les restructurations et le chômage, elles participent à la lutte syndicale où elles apportent l’esprit de conciliation typiquement petit bourgeois et forment, en fusionnant souvent avec l’aristocratie ouvrière, le gros des troupes des bureaucraties collaborationnistes des syndicats et des partis soi-disant ouvriers.

Si là aussi le prolétariat peut espérer neutraliser certaines de ces couches et attirer à lui une partie d’entre elles dans la lutte contre le capitalisme, ce n’est pas seulement en les intéressant par des revendications qui les soulagent des effets destructeurs du capitalisme, c’est aussi en combattant pied à pied leurs aspirations réactionnaires, leurs prétentions démocratiques, et leur indécision catastrophique, et en faisant preuve à leur égard de la plus grande fermeté.

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5. La défense des conditions de lutte des masses exploitées, et la lutte contre la violence et la répression capitalistes

 

Le recours à la tactique parlementaire est tout à fait dépassé, au moins dans les pays où l’accomplissement des tâches bourgeoises est achevé et, de façon plus générale, là où les élections ont pour fonction essentielle d’amortir les luttes sociales par l’illusion de l’alternance démocratique. Dans de telles conditions, la tactique électorale a pour effet de polariser et d’épuiser les énergies du parti dans des mobilisations dont le terrain et le moment sont entièrement décidés par l’adversaire ; l’avantage, de moins en moins évident, de l’utilisation des parlements comme tribune révolutionnaire ne compense pas ces inconvénients, alors que la tactique abstentionniste rend au contraire plus claire la propagande antiparlementaire de principe du communisme révolutionnaire.

Le refus des communistes de participer aux parlements-croupions, aux organes municipaux auxquels ne reste même plus l’ombre d’une autonomie locale, ou aux élections présidentielles, ne signifie nullement qu’ils s’abstiennent de la lutte politique et qu’ils renoncent à avancer des revendications même politiques vis-à-vis de l’État capitaliste.

Bien au contraire. Partisans de la conquête du pouvoir politique par l’entraînement des larges masses dans la lutte révolutionnaire, ils portent au cœur même des luttes quotidiennes de la classe ouvrière et des masses paysannes pauvres la conquête et la défense des conditions d’une lutte politique ample et vraiment large, à savoir les libertés de réunion, d’association, de presse écrite et parlée, de grève, etc.

Là où elles existent, ils défendent pied à pied ces libertés contre les attaques dont elles sont l’objet et n’acceptent pas qu’elles soient soumises à la moindre limitation juridique ou, pire, à la moindre autolimitation de la part des courants opportunistes et démocratiques. Les droits sont faits pour être utilisés. Ils sont autant de fils à la patte de la classe ouvrière s’ils ne servent pas à la lutte directe contre l’État capitaliste.

Là où le prolétariat ne possède pas les libertés élémentaires, comme dans les pays faussement socialistes ou dans la plupart des pays du Tiers Monde, il lutte pour elles sans jamais faire dépendre leur conquête d’une quelconque modification de la constitution, de l’évolution de l’État capitaliste dans un sens plus libéral, sans chercher l’appui des forces qui ne réclament ces droits que comme complément d’un État plus fort fondé sur la concorde sociale. Il doit être instruit du fait qu’il ne peut les arracher que dans la lutte contre l’État et contre les tentatives démocratiques de les vider de tout contenu.

Les communistes révolutionnaires combattent les efforts de la bourgeoisie pour renforcer constamment sa bureaucratie d’État, ses organes de répression, sa justice, sa politique et toute la législation qu’elle dresse contre la classe ouvrière. Ils n’imaginent pas cependant un retour possible aux vieilles formes libérales, surtout pas avec la démagogie des réformes proposées par les courants de la gauche impérialiste et soi-disant ouvrière, qui ne visent qu’à parer le renforcement de l’État bourgeois d’un vernis agréable pour attirer le consentement des exploités.

Les communistes combattent le blindage de l’État capitaliste en se plaçant sur le terrain de la pression de classe organisée contre lui. Ils profitent des épisodes de lutte pour faire la démonstration que cette tendance de l’État ne peut être renversée que par la solution révolutionnaire ; ils appellent en conséquence les prolétaires à s’y préparer dès aujourd’hui en se défendant énergiquement contre la violence bourgeoise dans les usines et les quartiers, sans faire la moindre confiance aux soi-disant garanties juridiques qui, même dans les pays réputés les plus libres, ne sont que des chiffons de papier que la bourgeoisie déchire sans hésitations devant une révolte prolétarienne.

Ils luttent pour organiser, en liaison avec la lutte prolétarienne, l’autodéfense et la protection de la classe, de ses militants, de ses organisations, contre la violence paralégale des tueurs à la solde de la bourgeoisie, milices privées, gardes blanches, groupes fascistes, frères musulmans et autres supplétifs, ainsi que contre les crimes racistes, les pogroms antisémites, les flambées de haine religieuse, xénophobe, les expéditions contre les castes dites inférieures, etc., mais aussi et surtout contre la violence légale de la bourgeoisie, celle des forces de police, de gendarmerie, des corps spéciaux de répression et autres mercenaires assermentés.

Ils combattent comme criminelles les exhortations faites à s’en remettre à l’État capitaliste contre les violences illégales : cela n’a jamais eu d’autre effet que de stériliser la lutte prolétarienne ou de la livrer sans défense à la répression légale.

La lutte prolétarienne doit également une solidarité active et permanente aux militants prolétariens emprisonnés ou frappés par l’adversaire, indépendamment de la justesse ou de l’inefficacité de leurs conceptions politiques, et plus généralement à toutes les victimes de la répression capitaliste. Cette solidarité prend des formes multiples ; la défense juridique, le soutien aux familles des victimes, la lutte pour vaincre l’isolement où la bourgeoisie confine les prisonniers, la lutte pour rendre les conditions de détention moins dures, pour la libération des otages que l’adversaire de classe garde dans ses geôles, pour la levée de toutes les peines, etc.

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6. La lutte contre le militarisme bourgeois et les préparatifs de la guerre impérialiste

 

Le combat contre les préparatifs d’un nouveau conflit impérialiste ne se mène pas seulement sur le terrain idéologique où doivent être démontées toutes les justifications hypocrites de la bourgeoisie. Il se livre aussi sur le terrain de la lutte et de l’organisation immédiate de la classe :

 

a) en combattant dans la politique du nationalisme économique et de scission pratique des rangs prolétariens la préparation à la politique militariste de défense nationale, en mettant en relief l’identité d’intérêts et de but des travailleurs en lutte dans le monde entier et en exaltant le sentiment internationaliste des prolétaires ;

b) par l’organisation de la jeunesse prolétarienne, première victime du militarisme bourgeois, en renouant avec les belles traditions de l’antimilitarisme prolétarien et révolutionnaire ;

c) en soutenant les luttes des prolétaires sous l’uniforme et en établissant les liens les plus étroits entre les ouvriers et les soldats ;

d) en combattant pied à pied toute tentative de militarisation de l’industrie et des secteurs dits stratégiques ;

e) en luttant contre toute intervention armée visant à assurer la sécurité des approvisionnements, les voies maritimes, contre toute autre manifestation de piraterie impérialiste.

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7. La lutte contre l’oppression impérialiste

 

L’impérialisme, par l’oppression généralisée des petits pays par les plus grands, même lorsqu’ils sont publiquement proclamés indépendants, entraîne une division des rangs prolétariens qui ne peut être surmontée que par la lutte la plus vigoureuse dans les pays oppresseurs et les nationalités oppresseuses, en tout premier lieu dans les pays impérialistes, contre tout privilège national, toute mise en coupe réglée de nations plus petites, toute oppression de type racial, national ou colonial, etc., contre tout esprit de supériorité nationale, tout social-chauvinisme, tout social-racisme.

Dans ce but, les communistes révolutionnaires doivent agiter comme objectifs du mouvement de classe des prolétaires des pays qui en oppriment d’autres :

 

a) l’indépendance immédiate et sans condition pour les colonies, le droit à la séparation pour les minorités nationales maintenues par la violence dans les frontières d’un État oppresseur, la suppression de tout privilège de type colonial, fondé sur la race (Afrique du Sud), la religion (Irlande, Israël), etc. ;

b) le retrait immédiat et sans condition des troupes de son propre État des pays occupés ou opprimés, de la Russie en Afghanistan ou en Europe de l’Est, des impérialismes français et anglais en Allemagne ou en Afrique, des Etats-Unis dans pratiquement toutes les parties du monde ; de même la dénonciation de tous les traités et accords inégaux imposés par son propre État, en particulier les prétendus accords de coopération de l’impérialisme français dans ses chasses gardées africaines ou de l’impérialisme américain en Amérique latine, en Asie du Sud-est ou en Extrême-Orient ;

c) il est également indispensable à l’union du prolétariat mondial que les prolétaires des pays d’immigration luttent la main dans la main avec leurs frères immigrés contre les persécutions xénophobes et racistes, contre tout contrôle de l’immigration et pour l’égalité totale de tous les droits. Ceci est particulièrement important dans les pays impérialistes d’Europe, aux Etats-Unis et même en Australie et au Japon, mais également dans des pays du Tiers Monde comme ceux de la péninsule arabique, l’Afrique du Sud ou le Venezuela, le Brésil, l’Argentine, etc.

 

Cette attitude du prolétariat dans les pays oppresseurs doit s’accompagner dans les pays opprimés ou les pays d’émigration ouvrière d’une vigoureuse propagande pour l’unité internationale du prolétariat et son organisation par-dessus les limites de nationalité. Les communistes des colonies et des semi-colonies doivent montrer que la lutte pour le retrait des troupes impérialistes ou pour l’indépendance n’est pas une fin en soi, mais un moyen de destruction révolutionnaire de l’impérialisme oppresseur. Dans les pays où le capitalisme a déjà vaincu et à plus forte raison dans ceux où il est déjà plus que mûr, mais où la bourgeoisie peut encore soulever la question de la lutte de libération nationale (par exemple les pays de l’Europe de l’Est) ou celle de l’unité nationale (Corée, Allemagne), les communistes se refusent à faire de ces revendications des objectifs de la lutte prolétarienne.

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8. La lutte pour l’accomplissement des dernières tâches bourgeoises dans le Tiers Monde

 

L’achèvement de la phase révolutionnaire bourgeoise dans le Tiers Monde s’opère sans que les bourgeoisies locales aient été capables de réaliser leurs promesses. C’est la raison pour laquelle, au terme de son cycle révolutionnaire, la bourgeoisie laisse en héritage au prolétariat une quantité de tâches bourgeoises, qui n’existent plus qu’à l’état de traces dans les pays capitalistes avancés et les plus impérialistes, mais restent de puissants leviers de la lutte révolutionnaire prolétarienne dans les pays d’Asie, d’Afrique et dans certains pays d’Amérique latine.

Il s’agit principalement – hormis les revendications des libertés politiques élémentaires déjà mentionnées précédemment – des questions suivantes :

 

a) élimination des résidus de propriété foncière archaïque, des restes de privilèges féodaux, tribaux, religieux ;

b) élimination des restes de servage et d’esclavage colonial et des privilèges impérialistes ;

c) lutte contre les discriminations fondées sur la situation sociale, la race et la religion, contre l’oppression particulière des femmes, pour l’égalité juridique la plus totale devant l’État ;

d) lutte pour la séparation de 1’Eglise et de l’État, pour l’enseignement obligatoire et aux frais de l’État, pour la forme républicaine de gouvernement, contre toute restriction à l’égalité politique dans l’État, etc.

 

Il n’est pas exclu que la bourgeoisie avance encore à un moment ou à un autre certaines de ces revendications, en particulier celles qui concernent l’État, comme l’instauration de la république ou des libertés politiques. Mais elle le ferait en les isolant des autres et en les privant de tout tranchant révolutionnaire. Mieux, elle les conçoit comme de simples réformes accordées pour tromper le prolétariat et obtenir son appui à l’État ainsi démocratisé, bref comme un instrument pour renforcer encore sa domination de classe. En tout état de cause, le prolétariat fait de ces revendications, qu’elles soient politiques ou sociales, un levier de son émancipation révolutionnaire et n’attend leur satisfaction complète que de sa propre dictature de classe. Toutes ces revendications font désormais partie du programme immédiat de la révolution prolétarienne mondiale.

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9. La lutte pour la renaissance de la solidarité prolétarienne internationale

 

La solidarité internationaliste est un levier indispensable de la lutte prolétarienne. Le stalinisme l’a dénaturée en la mettant au service de la défense de l’impérialisme russe. Les partis social-démocrates et national-communistes l’ont avilie en opposant hypocritement aux luttes anti-impérialistes nationales les intérêts d’une lutte de classe internationale du prolétariat qu’en réalité ils dévoyaient et sabotaient également dans les métropoles impérialistes. Ils l’ont foulée aux pieds en enchaînant les différents contingents nationaux du prolétariat à leurs différents États bourgeois dans le brigandage impérialiste.

L’éveil du sentiment internationaliste de la classe ouvrière ne se fera pas seulement par la propagande pour le but révolutionnaire, international et internationaliste, mais à partir des exigences quotidiennes de la lutte prolétarienne. C’est dans cet esprit que les communistes révolutionnaires attachent la plus grande importance aux tâches suivantes :

 

a) la popularisation internationale des grandes luttes prolétariennes, où la classe ouvrière peut sentir l’identité de ses intérêts communs ;

b) l’établissement de liens internationaux entre les travailleurs par le soutien aux luttes des travailleurs immigrés, à travers la solidarité avec les luttes prolétariennes ou toute autre lutte dirigée contre l’ordre établi impérialiste dans les divers pays, à travers la lutte contre l’Internationale des flics et la solidarité contre la répression capitaliste dans le monde, etc. ;

c) la lutte dans chaque pays contre les crimes impérialistes, contre le militarisme et les préparatifs de guerre de sa propre bourgeoisie, qui sont autant de conditions pour surmonter les dissensions nationales entre prolétaires, entretenues par la propagande chauvine de la bourgeoisie et de ses larbins, et pour réaliser l’union fraternelle des prolétaires de toutes les nationalités.

 

C’est à partir de l’organisation de ces tâches élémentaires que pourra commencer à se coordonner l’action internationale du prolétariat et qu’il sera possible de viser des objectifs internationaux plus ambitieux.

 

 

Parti Communiste International

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